Le blog coruscant et capricant d'un couple de garçons en retour d'exil

samedi 28 juin 2008

Blues de C.A.

Dernier Conseil d'administration de l'année.
Je m'aperçois au beau milieu de la réunion que mon pouce est maculé d'encre. En fait, j'ai aussi une immense tache bleue autour de la bouche. Mais comment ai-je fait mon compte?
"Un vrai gosse!". Ma voisine éclate de rire alors que tout autour de nous, on parle décision budgétaire modificative.
Planquage et frottage de bouche en toute discrétion. Je ne comprends toujours pas comment ça a pu passer (presque) inaperçu! Il faut que j'arrête les réunions, moi...

Pitou G.

vendredi 27 juin 2008

Le retour de Saby Banana

Avis aux amateurs, Saby Banana est toujours la reine des boulettes célibataire. Entre deux saucisses cocktails (Saby Banana est une modaine, voyez...), un jeune homme s'avise de la séduire : elle est prof de lettres classiques, il est agrégé d'histoire; elle est belle, il est inadapté social. Pas de raison que ça loupe.
Il la colle donc toute la soirée, l'étouffe de sa conversation pas-sion-nante ("et alors à la chute de Constantinople..."), elle n'en peut mais. Devant tant de réticences, il décoche son arme ultime :
"Mon père boucle actuellement sa thèse sur Annobe*. Tu connais Annobe?
_ Moi, je connais juste Annobe et Willy"

Elle a eu la paix tout le reste de la soirée...

Pitou G.

*Annobe : d'après les dires de Saby Banana (qui n'a peut-être pas bien retenu son nom et, a fortiori, pas son orthographe), enfin d'après ceux de son Dom Juan, il s'agirait d'un auteur latin tardif. J'ai eu beau multiplier les recherches (Hanobe, Anobbe...), je n'ai pas trouvé trace de lui sur le net. Si quelqu'un a une piste...

Edit à 15H00 : Callie nous apprend qu'il s'agit d'Arnobe - on comprend mieux la confusion de Saby Banana.

jeudi 26 juin 2008

Le temps des cathédraleuh

Brevet des collèges.
La salle que je surveille est remplie aux deux-tiers de garçons. Au bout d'une heure et quart, les cinq filles du départ composent toujours. Des mâles vaillants, il ne reste que deux spécimens.
Je fais part de ma (semi-)surprise face à ces statistiques à ma camarade de surveillance.
"Et après, on s'étonne qu'elles réussissent mieux que les garçons!", conclut-elle.
J'opine du bonnet (quel bonnet?*).

C'est ce moment que choisit la première de ces demoiselles pour rendre sa copie.
Je feuillette (juste pour vérifier que tout est en ordre, hein, et pas parce que l'épreuve d'histoire est la plus poilante à lire) et lis ceci, dans la rubrique "repères culturels" (le must have de toute copie de brevet qui se respecte) :

le temps des cathédrales : IIe siècle avant J-C

Ouais. Et après on s'étonne qu'elles réussissent mieux que les garçons...

Pour les nostalgiques de Quaidesomme

Pitou G

P.S. : j'ai aussi eu du Louis XIV en 1200 et des poussières ou en 1880 (sacrée longévité, le garçon...)
P.P.S. : On se souvient ici que les cathédrales sont souvent malmenées par nos ouailles.

* Spéciale dédicace à Muriel Robin

mercredi 25 juin 2008

Les éditions Haquenée présentent

Après dépouillage des emprunts effectués par mes élèves au CDI (best-seller la collection 100%animaux; à partir de 7 ans...), j'ai décidé de me reconvertir dans l'écriture d'une collection prometteuse :

Ecurie Grenadine


J'ai déjà la bande-son pour accompagner la création. Enjoy it :


mardi 24 juin 2008

Grelinda, dure du fion

Grâce au ciel, ils me détestent assez pour m'épargner ce type de confidence. Cette perle de Grelinda (qui persiste, bonne âme, à venir en cours) fut pour mon collègue d'espagnol :

"M'sieur! Y a Childrik qui dit que l'anus, c'est un muscle (plus doué en anatomie qu'en histoire de l'art, le gars Childrik)!
_ Et tu dis que c'est quoi, toi, Grelinda?
_ Bah, tout le monde sait que c'est un os!"

C'est vrai qu'il nous arrive de nous casser le c#l pour savoir comment les occuper, nos boutonneux. Mais aucun de mes collègues n'a jamais été arrêté pour fracture de l'anus...

*

Childrik sait depuis des lustres qu'il n'a pas le droit de s'asseoir au fond, que sa nouvelle place, c'est sous mon blair (le seul endroit d'où il n'essaie pas de communiquer avec son ancien voisin par des gestes ostensibles). Childrik le sait, mais il tente quand même le coup une fois sur deux. Juste histoire de s'assurer que je n'ai pas sifflé une bouteille de rouge au petit-déjeuner ou qu'un clone extra-terrestre ne s'est pas substitué à moi. Mais non, croyez bien que je le regrette.

Je le prie instamment de bien vouloir venir au premier rang, s'il-te-plait Childrik. Je dis s'il-te-plait tout en aboyant : je suis un roquet bien élevé. Suit le moment flottant où je me demande toujours s'il va obtempérer ou pas, puis celui, presque fascinant, où je le vois traîner les pieds jusqu'à la place que je lui ai assignée. En râlant, évidemment : comme Childrik est un vrai mec, rempli de valeurs positives, humanistes et civilisatrices, il accompagne tout acte servile d'une réflexion insolente. Childrik, c'est j'obéis, mais pas trop.

Voici la sélection de la semaine :
"Je peux pas m'asseoir là-bas, plutôt?
_ Non.
_ Ah! En fait vous me mettez exprès devant vous...
_ Bingo!
_ Comme ça, vous croyez pouvoir vous faire des amis!"

Voilà. Vu que je n'ai pas d'amis, j'essaie de sympathiser avec des crapules de 14 ans. Peut-être que si je braille à deux centimètres de son tympan, il m'invitera à jouer à la Playstation 3... Parce qu'à l'allure de son portable, il doit bien en avoir une (mais pas de sous pour acheter un bouquin à 3€, faut pas déconner). En plus, je suis sûr qu'il connaît tous les bars sympa!

*

Je suis sûr que beaucoup d'entre vous, surtout des non-enseignants, se demandent comment on peut tolérer une telle attitude. Je répondrai juste que voir un môme comme Childrik changer de place ou sortir une feuille, c'est déjà une victoire. Le voir écrire une phrase, ça tient carrément du prodige (d'ailleurs, les rares fois où ça lui arrive, je retrouve la feuille gribouillée abandonnée sur sa table, après son départ). J'ajouterai aussi que je déteste virer les gosses, surtout quand je sais qu'ils vivent un calvaire avec moi (exception faite de Grelinda, parce qu'avec elle, je ne réponds plus de moi); qu'après avoir collé à tour de bras ce genre de spécimen, on s'aperçoit que leurs nuits ne suffiraient plus à absorber les retenues déjà infligées.

J'ai rencontré le beau-père de Childrik, une fois. J'ai su tout de suite que ça ne mènerait à rien : le môme est plus intenable à la maison qu'en classe. Il faut dire qu'avec ses 23 ans à tout casser et ses grands maillots de basket, on imagine davantage Beau-papa sous la douche qu'en chargé de famille... Encore une histoire compliquée.

*
Et l'info du jour, c'est que Grelinda et son clone suçotent en cours leur porte-clé tétine, parce que, c'est pas du juste, leur ordi n'arrête pas de planter. Le "hasard" peut être cruel, parfois...

Pitou G.

samedi 21 juin 2008

Jouons à la poupée avec Pitou G.

Je me décide enfin à honorer le tag d'Ashley qui nous invitait à parler de notre garde-robe. Rien de bien exaltant : il n'y a pas de squelette dans notre placard.

Quel est le vêtement que tu adorais (au point de ne mettre que cela) mais qu’il est hors de question de reporter aujourd’hui ?
Je ne me souviens pas avoir été jamais sujet à un fétichisme de longue durée pour une fringue en particulier. Il faut peut-être remonter à l'époque des sous-pulls en acrylique portés à même la peau (et qui faisaient des étincelles quand on les ôtait) pour trouver un vêtement a priori ringard que j'ai aimé porter.
J'ai beaucoup aimé le jean carpenter GAP que mon frère m'a offert quand j'étais en terminale. Le jour où un inconnu m'a apostrophé dans la rue en me disant : "oh la jolie petite pupute!", j'avoue que ça m'a un peu refroidi (surtout venant d'une blondasse décolorée). Mais ce pantalon-là, il m'arrive encore de le remettre.


Le vêtement que vous ne jetterez jamais de la vie ?
Je ne suis pas près de jeter mon blouson en cuir. Archi-porté et reporté, il est un peu usé aux entournures, mais je l'adore. Je n'ai jamais regretté mon achat, même si devant la caisse, la grosse somme m'avait donné des sueurs froides.


Une seule fringue de marque ou beaucoup à petits prix ?
Une seule fringue de marque, ce , n'est pas jouable, à moins d'aimer aller bosser en slip un ou deux jours par semaine, le temps que le costume Kenzo revienne du nettoyage à sec. Beaucoup de fringues made in China, ce n'est pas trop mon style non plus. De toute façon (et je suis misogyne si je veux!), le plaisir d'avoir plein de vêtements différents est essentiellement féminin, la variété des habits masculins étant très limitée. Donc, sans surprise dans mon univers consensuel, c'est un nombre moyen de vêtements, de marque accessible.


Le vêtement de tes rêves ?
Facile. Un costume taillé près du corps qui fasse à la fois sexy, classe et sérieux. Genre jeune loup capitaliste (oui, je sais, j'ai des aspirations affligeantes).

vendredi 20 juin 2008

Fraîcheur des sous-bois

Après les lunettes, les bottes. Je suis en passe de devenir l'homme le plus sexy du bahut, coiffant au poteau l'espèce de bombasse brune qui enseigne l'EPS (mais il n'y a pas de mérite à être beau quand on est prof de sport), grâce à mon génie des accessoires bien choisis. On n'a jamais assez d'accessoires. Et ce n'est pas Enlumineur qui va me contredire, lui qui se préoccupe de plus en plus de mon apparence physique (pour mémoire, Enlumineur est un "Il ne le sait pas encore").

L'une des raisons pour lesquelles je rechignais à être malade cette semaine (au fait, ça va beaucoup mieux, merci), c'est que je devais accompagner en forêt deux classes de Bisounours. Remarquez, j'aurais tout aussi volontiers accepté d'y escorter Grelinda et ses pairs, contre la permission de les abandonner sur place. Mais là, c'était du gratis pro Deo, la promesse d'une matinée tranquille. Et c'est avec confiance que j'abandonnai mon séant au fauteuil du car.

Le temps de virer à droite, une rumeur inquiétante se fait entendre : "léonléonléon" j'ai les mêmes à la maison, suivie d'une odeur plus inquiétante encore. Il est 9H00, et c'est la gerbe à bord. Heureusement que l'année touche à sa fin : Léon ne sera surnommé Vomito qu'une dizaine de jours (ah oui, on ne vous avait pas dit? les Bisounours, ce n'est plus ce que c'était...).

En attendant, les mômes hurlent tous à l'empuantissement. Le car s'arrête en pleine campagne, c'est-à-dire en pleine ville, mais à côté de l'hippodrome (Orne oblige). Léon va terminer dehors ce qu'il a entamé, bientôt suivie par Fillette-la-Malaucoeureuse. Pendant ce temps, tandis que les Bisounours grimacent, détournent la tête et implorent la Miséricorde céleste (tout ça en même temps, puisque je vous dis que ce sont des surdoués!) juste histoire de dramatiser la scène (c'est très drama-Queen, un Bisounours de 12 ans), l'organisatrice éponge ce qu'elle peut avec les kleenex qu'elle a pu collecter, en camouflant de son mieux sa répugnance. Après avoir ouvert toutes les fenêtres, je m'arme de mon courage le plus affûté et de mon ultime mouchoir jetable, en espérant que le miracle que j'attends arrive... Pascal avait raison, Chateaubriand itou : demain je me fais baptiser.

"Non, je t'en prie, ça va aller Pitou G."

J'adore ma collègue. Il faut dire que j'ai déjà fait le douloureux sacrifice de mon beau sac Carré Beige, le seul assez grand pour contenir mes bottes (oui, l'heure d'avant, j'avais décidé de faire cours avec des chaussures de ville : Tite-Live in the rain, ça le fait moyen) : il a tristement fini dans une poubelle, rempli de sucs gastriques alors qu'il était né pour connaître des draps chics...

Après il a fallu transmigrer Léon (pas parce qu'on est mieux à l'avant qu'à l'arrière, hein, mais parce qu'on craignait de sanglantes représailles). Devinez un peu à côté de qui on l'a installé... Cela dit, le Pitou G a ceci de plus évolué qu'un Bisounours qu'il sait respirer par la bouche. Une autre collègue nous raconte comment, une fois, un gamin lui a régurgité sur la tête dans un gîte où il n'y avait que de l'eau froide. On a bien ri, et le car est reparti.

Léon a juste revomi une fois après ça, mais dehors, alors que ses camarades croquaient un paysage remanié par l'homme (enfin, très nature quand même). Autant dire que les gosses ont tout lâché séance tenante pour zieuter leur copain avec dégoût et moult commentaires.

Le reste de l'expédition fut paisible, sauf qu'on est tombé sur des roches métaphoriques, et que les Bisounours ont voulu incendier la forêt en frottant des morceaux de grès (mais le Tout-Puissant, qui aime la Normandie, l'avait gorgée d'eau, on n'est jamais trop prudent). De retour au bahut, remarquant sur le sol une grande étendue fraîchement lavée, l'organisatrice et moi avons échangé un regard complice et hilare. Léééééééééoooon?

Pitou G.

jeudi 19 juin 2008

Le syndrome Sophie M.

Hier matin, en plus d'être à l'article de la mort, je suis tombé en panne sèche de produit lentilles. Il a fallu que je chausse mes lunettes, un jour de boulot, pour la première fois de l'année. Attendre le mois de juin pour surprendre ainsi ses ouailles, c'est un mauvais plan, un coup de canif dans le contrat de confiance qu'on a établi avec les mômes.

À la récré, tandis que je traverse les couloirs, j'entends un groupe de filles jacasser avec animation, sans se laisser troubler par un événement aussi mineur que ma proximité. Visiblement, Marie-Chou, que j'ai eue à 8H, a déjà rapporté le scoop à sa bande de copines.

"Vous avez vu, je vous l'avais dit : il porte des LUNETTES!
_ Moi, je trouve que ça fait étudiant."

Etudiant. Me voilà frappé du syndrome Sophie Marceau

Mettez-lui une paire de lunettes sur le bout du nez et, magie! Sophie M.
devient agrégative de lettres classiques. Sophie, tu es mon modèle.


Au moment où je m'apprêtais à descendre les escaliers, Asiate, l'une des potineuses, m'a hélé : "Monsieur Pitou! Elles vous vont bien, vos lunettes!"

Après, j'imagine qu'elles ont dû parler de leur dernier cours de maths du nouveau pantalon de Mister YoungFather...

mercredi 18 juin 2008

Scrupules

Vraiment, mes scrupules m'honorent, mais qu'est-ce que je suis quiche! Je me suis traîné toute la journée tous les inconvénients d'une bonne maladie des familles, sans en connaître les consolations. Si vous suivez attentivement mon exemple, vous apprendrez à bousiller votre après-midi de repos.

La nuit de lundi à mardi m'a transporté dans un cauchemar type supplice de Sisyphe : je me réveillais toutes les deux heures, grelottant, avec en tête une mission à accomplir, d'autant plus infaisable qu'elle était incompréhensible. Il s'agissait plus ou moins d'écrire mentalement une rédaction sur un combat de chevaliers. Les phrases que je formulais dans mon rêve étaient validées ou non suivant des critères inconnus, l'ensemble n'avait aucune cohérence, ça me rendait dingue. Et finalement, il m'a fallu fabriquer un miroir sur le sol de la Galerie des glaces.
J'ai fini par m'évader de ce demi-sommeil, pour constater que j'avais mal au ventre, à la tête, partout; que je n'arrivais pas à me tenir droit; que j'avais envie de vomir mais qu'étrangement, je n'y arrivais pas.

Mardi matin, j'ai eu du mal à m'arracher du lit. Pitou V. m'a fait chauffer un coussin cerises pour décontracter mon bedon secoué de légers spasmes. Et comme l'aspirine faisait effet, première erreur, je suis allé au travail ("mais si, chéri, j'ai que trois heures de cours, de toute façon!")

Cette chose est trouvable chez Nature et scientologie Découvertes

Les deux premières heures se sont à peu près bien passées. Bon , en terme de contenu, ce n'était pas brillant et j'étais obligé d'aller m'asseoir toutes les cinq minutes, mais le calme des 5e Anges m'a permis d'assurer le minimum syndical. Une alarme incendie providentielle m'a même permis d'aller prendre un bol d'air à point nommé.
Evidemment, à 10H, l'aspirine n'était plus qu'un lointain souvenir. Il a fallu que je me cramponne au bureau pour survivre à ce cours avec la classe de Grelinda , que la fin de l'année rend encore plus imbuvable - je ne pensais pas que c'était possible. À 11H, je corrige quelques interros urgentes et rentre les dernières notes, tremblant et gémissant. À 11H40, à l'issue de ma longue journée de travail, je juge plus prudent de prévenir la chef adjointe qu'il est possible qu'on ne puisse pas trop compter sur moi le lendemain, voire le surlendemain, et qu'il faudrait recruter d'éventuels remplaçants pour un conseil et une sortie où ma présence est prévue. Je lui dis que j'appellerai après avoir consulté le médecin, pour annoncer s'il fallait ou non avertir les élèves de mon absence. Sur ce, elle me souhaite un prompt rétablissement.

Suivent les deux pires heures de la journée où il a fallu attendre une heure ouvrable pour aller voir le médecin. Mon ventre ne m'épargne plus : je ne peux que patienter en souffretant. À deux heures, je me traîne chez le médecin en bas de la rue et sonne. Pas de réponse; pas d'horaires affichés. Je pousse 500m plus loin, jusqu'à un autre cabinet. Sur rendez-vous uniquement, et pas le mardi... Je me suis juré de ne tomber malade que le lundi et le jeudi de 14 à 16H et suis rentré chez moi.
J'ai empoigné mon téléphone et appelé le premier médecin. Oui, je sais : j'aurais pu commencer par là, mais pour mon cerveau malade, il est plus facile de se rendre sur place directement. Bref, le médecin m'annonce que les visites libres sont à partir de 16H... Un rapide calcul me permet de comprendre que ça risque d'être dur de faire prévenir mes élèves avant l'heure de la sortie. Mais à ce moment-là, je n'ai déjà plus qu'un désir : étouffer ma douleur sous la couette. Ce fut sans doute ma deuxième erreur...

Lorsque je me réveillai à 15H45, je n'irais pas jusqu'à dire que j'étais frais et dispos, mais il ne restait de mon triste état qu'un mal au ventre à peine perceptible. 15H45... Il y avait un arbitrage à faire : aller voir le médecin et lui dire, "youpla, ça va pas si mal!" ou appeler le collège et annoncer "youki, paix sur la terre, je serai là demain!" en bénissant les vertus réparatrices du sommeil. Je vous laisse deviner mon choix . Ce fut ma troisième erreur.
La principale adjointe s'est vue déchargée d'un gros souci d'organisation. Quant à moi, je me suis curieusement senti volé : c'est que j'avais commencé à me faire à l'idée d'un mercredi (et pourquoi pas carrément d'une fin de semaine) chômé à roupiller. Lot de consolation : j'ai séché un conseil de classe.

Quand ils m'ont vu rappliquer dans mon état spectral, ce matin, mes collègues m'ont dit que, ouhlala, je n'avais pas l'air d'aller mieux. C'est vrai que mes symptômes avaient changé, mais je n'allais pas beaucoup mieux. La rémission était illusoire, ce n'était que l'effet pervers de la sortie du sommeil : le mal est assoupi et ne demande qu'à se réveiller. J'ai entendu de curieuses réactions du style : "tu n'as plus rien à prouver, repose-toi pour finir l'année". Mais là encore, ce n'était qu'une matinée à tenir.

Là, il est 16H et je n'ai toujours pas mangé, vu que j'ai oublié ce qu'était l'appétit. Et demain, comme un brave petit soldat, j'irai accompagner une sortie qui, en mon absence, serait tout simplement annulée. Mais pour le reste de la semaine, je ne réponds plus de rien. Quoique, après tout : il n'y a plus qu'une quinzaine à tenir...

Pitou G.

P.S.: Ce n'est pas encore demain que j'aurai mon médecin référent...

mardi 17 juin 2008

La grève des enfants

S'il est insupportable d'entendre sa voix enregistrée, c'est un supplice autrement cuisant d'écouter sa voix d'enfant.
Quand j'étais minot, il m'arrivait de m'enregistrer sur des cassettes audio (ces vestiges d'une lointaine civilisation) dans des activités aussi indispensables que la récitation de l'alphabet grec en chanson (voix de fausset en série) ou la psalmodie du champ lexical de la bouffe en italien (frittata et tutti quanti... merci Assimil). Je suis fortuitement retombé sur l'une de ces pièces à conviction.



Découvrez Chantal Goya!


Alors bien sûr, c'est insupportable de subir sa propre voix version prépubère, ce mince filet aigrelet qui vous vrille les tympans plus sûrement qu'une meute d'enfants dans une cour d'école. Je repense aujourd'hui, avec un mélange de respect et de compassion, au calvaire enduré par ma mère lorsque je reprenais à tue tête (et inlassablement) le générique de Vous êtes folle, Imogène. (imo imo imo imo imo imogéneuh ad lib.)

Mais relativisons, il existe des documents plus compromettants : quelques cassettes vidéo où mon frère et moi présentons le Club Circé, clone de Dorothée, en compagnie de peluches et de chats, doivent encore prendre la poussière sur une étagère oubliée. Avec l'image en plus, ce n'est rien de moins qu'une descente aux Enfers, un truc qui justifierait qu'on me jette des cailloux.

La voix était haut perchée, mais la conscience politique était déjà là : la bande magnétique ne ment pas et charrie un chapelet de souvenirs... Ah! la grève des enfants! Emmitouflés dans des duvets criards, mon frère et moi occupions l'escalier en scandant :

La grève des enfants
C'est la grève
Des enfants
On-leur-interdit
de
regarder-la-télé

Je ne crois pas que nos parents aient jamais cédé à cette démonstration de force (courageuses oreilles) : ils nous préparaient à toutes ces manifs inutiles qui devaient suivre...

lundi 16 juin 2008

Des Hurons au Grand Siècle

"L’on parle d’une région où les vieillards sont galants, polis et civils ; les jeunes gens au contraire, durs, féroces, sans mœurs ni politesse (...). Les gens du pays le nomment *** ; il est à quelque quarante-huit degrés d’élévation du pôle, et à plus d’onze cents lieues de mer des Iroquois et des Hurons".
Jean de La Bruyère, Les Caractères, "De la Cour", §74


Au cas où le château du Roi Soleil aurait eu la nostalgie de ces jeunes gens au coeur féroce qu'il abrita autrefois, Marie-Antoinette L. décida un beau jour d'y promener une escouade de godelureaux ornais. Elle me demanda d'être de l'aventure, en ma qualité de prof, ô combien comblé, des deux classes concernées. Il s'agissait d'escorter la classe de Catul-pas-de-e et Tibulle et celle de Grelinda. Une classe consolant de l'autre, j'acceptai : les bons-gentils garantissaient un genre d'équilibre avec les tartes-bestiaux. Je peux bien encaisser les insanités des uns en contrepartie des étoiles scintillant dans les yeux des autres.

Les étoiles n'ont brillé que dans mes rêves : à la suite d'un réjouissant mic-mac, on substitua à la classe sympa une autre meute de rustauds que je ne connaissais même pas (les gentils partiront la semaine prochaine avec des collègues plus fortunés). Les choses se présentaient sous leur jour le plus lumineux.

À ce stade, je suis au regret de décevoir nombre d'entre vous: la Toute Gracieuse Grelinda et son clone ne furent malheureusement pas des nôtres. Mais rassurez-vous, ses petits camarades ont de la ressource : Soiziguidic, Pithecon et, surtout, le petit Childrik étaient en très grande forme. Pour mémoire, Childrik est ce gosse qui se sent agressé quand vous lui dites "bonjour" et qui se retient à peine de vous sauter à la gorge quand vous lui rappeler qu'on ne garde pas son manteau en classe. Et c'est indiscutablement le grand champion de la journée.


Dans les couloirs du château

Evidemment, on s'est payé plus d'une fois la honte au cours de la visite :

- en séparant des gosses qui se foutent de petits coups de poing pour rigoler au beau milieu de la Galerie des Glaces;

- en apprenant que Picasso est le peintre officiel de Louis XIV;

- en observant le spectacle grandiose d'ado avachis dans une antichambre du roi ou laissant traîner leurs mains sur les linteaux des cheminées (et on a beau les rabrouer vingt fois, ce sont toujours les mêmes qui se font remarquer). Quand la guide se fend de commentaires assassins, ça devient très embarrassant;

- en constatant que Childrik est très têtu. Dans la chambre du roi, la guide commence par un avertissement : "les gens disent que le lit est petit, mais en fait il mesure plus de deux mètres sur deux. C'est parce que la salle a une surface de 100m2 qu'on a l'impression qu'il est minuscule".
Là dessus, le mioche s'écrie : "mais il est petit ce lit!". Et il insiste, le bougre! Il répète jusqu'à ce que la guide interrompe l'explication qu'elle donnait à Wenceslas ("non, il n'y a pas de passages secrets dans le château..."). Avec le sourire jusqu'aux oreilles mais peinant à dissimuler son agacement, la guide a eu cette étrange répartie : "mais c'est qu'il revient à la charge, ce petit! il me rappelle quelqu'un à la maison!"... Moi j'ai du mal à croire qu'une dame aussi polie ait pu enfanter un monstre comme Childrik. Pas sans le concours d'un Troll, en tout cas.

Pour le reste, si l'on excepte les ricanements et les "p'tains" continuels de Pithécon, les jérémiades d'Alizéa, les "c'est chiant" ou "elle parle trop la dame, moi j'écoute plus" de Soiziguidic et les "quand est-ce qu'on bouffe?" de toute la troupe, la visite s'est bien passée.

Dans le Parc

Le pique-nique fut un moment de réconfort, même s'il a fallu s'assurer que nos Hurons n'abandonnent pas par terre leurs immondices. Cela m'a valu ce petit mot tendre de Soiziguidic : "Mais il va encore nous faire ièch! Moi, j'aurais vraiment préféré partir avec M. Youngfather ou Mme Irène!".
Vibrant hommage. Il est bien sûr tout à fait évident que mes collègues les auraient autorisés à foutre le souk. Y a vraiment que Pitou G pour faire tant d'histoires!

Image d'Epinal : une collègue tient à bout de bras un sac en plastique abandonné par Pithécon et lui demande de ramasser les ordures qu'il a laissées par terre. L'échalas remplit le sac que ma collègue tient toujours et puis il s'en va en grognant et en lui laissant sa poubelle.

Le bouquet final

"C'est là qu'on est contentes d'avoir pris un homme avec nous.
_ Et en plus, sa voix porte bien!"

Le retour fut de loin ce qu'il y eut de pire. Vous le raconter en détail serait au moins aussi insupportable que de le subir. S'il fallait n'en garder qu'un seul souvenir, ce serait celui-ci :

Votre serviteur demande à Childrik, debout au milieu de l'allée centrale du car, au mépris des règles de sécurité les plus élémentaires, de s'asseoir (pour la douzième fois). Réponse civilisée du jeune homme : "C'est bon, j'suis assis, là, t'es content?".
Là, je le pourris sur place (j'aime pas trop que les élèves me tutoient; je suis un peu Vieille France, voyez : une journée à Versailles et je ne sens plus mes chevilles) mais il m'assure que j'ai dû mal entendre (comme mes collègues, un peu dures de la feuille). Cinq minutes après, il crapahute de nouveau au milieu du car. Bien obligé de prendre les devants :
"Childrik, assieds-toi! Et oui, je suis content" *

Quoique, Pithécon qu'on est obligé de changer de place pour cause de bordel dans le fond du car et qui y retourne en douce, c'est pas mal non plus...

Trois heures et demie de ce régime (foutus travaux!).
Et parmi les monstres, lisaient sereinement quelques 5èmes Anges venus compléter le car.

Voilà à quoi s'occupaient des collègues désoeuvrées
pendant que je vivais cet éprouvant périple


Pitou G.

* Il n'est pas inutile de rappeler ici que cette classe a un jour dit en substance à leur prof principal que je prenais mon pied à leur gueuler dessus et que j'étais bien content de les trouver pour me passer les nerfs. Dont acte.

dimanche 15 juin 2008

Histoire de chiffres


Les nombres du jour : 29 et 92

samedi 14 juin 2008

Vendredi treize

On a deux chats noirs, censés nous porter deux fois plus de chance. Et pourtant :
  • Pas de poste fixe pour mon Pitou V cette année
  • Son vélo volé pendant des obligations municipales
  • Des éléments donnant à penser que le furtif espoir d'avoir toutes mes heures au même endroit l'an prochain est plus que compromis
On aurait peut-être dû jouer au loto!

vendredi 13 juin 2008

Retour du tigre

La dépouille d'une musaraigne a été déposée devant la porte du jardin. On ne l'a pas encore vue, qu'on sait déjà qu'elle est de retour, la chatoune.

Elle a reparu, affamée, aussi soudainement qu'elle avait pris congé, il y a près de deux mois. Vu la constance avec laquelle elle occupe notre jardin, l'hypothèse qu'elle ait ailleurs un propriétaire semble de moins en moins probable.

Notre terrasse est bien entretenue, hein?

Par acquit de conscience, nous allons afficher sa photo chez la boulangère et mener une petite enquête de voisinage. Si personne ne se manifeste, nous la confierons à l'association qui nous a permis d'adopter Calim'. Parce que là, elle grève copieusement notre budget croquettes!
La situation actuelle (on te nourrit, mais tu restes dehors) est bâtarde, et j'ai un peu peur qu'on finisse par s'y habituer. Pour l'instant, nous avons résisté à la tentation de lui donner un nom, mais si on n'agit pas vite, ça deviendra dur de se séparer d'elle. Autant lui offrir un vrai foyer, c'est mieux qu'un strapontin. En plus, vu qu'elle est jolie avec ses yeux cernés de khôl et très câline, je pense qu'elle ne tardera pas à trouver preneur.

Bisou de bienvenue façon Calim' : et vas-y que je te morde!

Les relations inter-chatales sont plus complexes qu'on ne le croit. Tandis que Stu', notre grand escogriffe à la voix de crécelle, entretient avec elle une indifférence polie, Calim' malmène l'intruse qui le lui rend bien. Pourtant, le même Stuart tyrannise Gros Willy, le chat de la voisine, que Calim' regarde sans inquiétude. Le jeunot s'avère jaloux et misogyne; l'aîné déteste les petits gros : ils ont tous les deux séché les cours d'éduchation civique. Mais on ne se mêle pas trop de leurs félineries : à eux de trouver un modus vivendi.

Pitou G.

P.S. : ne me remerciez pas, un chat noir pour un vendredi 13, c'est bien naturel.

mercredi 11 juin 2008

La victoire de Nicole

Il est temps que l'année se termine : nous sommes tous sur les rotules, et ce n'est pas Nicole, une collègue d'anglais, qui irait me contredire. Hilare, elle m'a raconté son heure de cours la plus inutile du monde.

Elle a commencé par chercher partout ses photocopies. Elle les avait pourtant posées sur le bureau! Un collègue indélicat, peut-être... Ou alors, c'est qu'elles sont tapies dans un recoin de son cartable. Vidage de sac. Trois fois. En vain. Coup d'oeil dans l'armoire. Coup de bol : les mômes ne bronchent pas. Mais de photocopies, point.

Il faut se rendre à l'évidence : elles ne sont pas dans la salle! Nicole envoie un élève mander un surveillant, afin de pouvoir elle-même s'éclipser jusqu'à son casier. Un quart d'heure s'est déjà évaporé comme dans un (mauvais) rêve. Les feuilles sournoises ne sont ni dans la salle des profs, ni à côté de la photocopieuse. Et dire qu'elle n'a même pas l'original pour en faire un nouveau tirage...

Nicole s'en retourne auprès de ses élèves, absorbés par un pendu (en français, bien sûr), remercie le surveillant en se demandant comment elle va réussir à meubler le reste du cours. Par acquit de conscience, elle jette un dernier regard sur le bureau, soulève une feuille blanche et dévoile, ô miracle, les fiches tant convoitées. Elles n'auront jamais mis qu'une demi-heure à réapparaître. Qu'importe! Elles sont là, ça va rouler! Nicole les distribue, visiblement soulagée.
"Mais madame, ça, on l'a déjà fait!"

Il reste dix minutes de cours. C'est bien aussi, le pendu...

Pitou G.

Teasing : je vous raconte bientôt la journée d'enfer que j'ai passée avec la classe de Grelinda en sortie scolaire...

vendredi 6 juin 2008

Gourdiflotte is a is star

Je n'aime pas écrire ce genre de jugement péremptoire, mais le politiquement correct a atteint sa limite en la personne de Gourdiflotte.
Gourdiflotte est authentiquement bête. Au point, excusez du peu, de passer pour une crétine* aux yeux de sa classe. Et quand on sait que cette classe est celle de Grelinda, l'exploit confine au respect.

On se souvient qu'en anglais, Gourdiflotte glisse des "is" entre chaque mot. ("Hello is mister is YoungFather is!")( it is a is true is story!)

On se souvient qu'en science et vide de la tête vie de la terre, Gourdiflotte colorie l'Afrique quand on lui demande de colorier la plaque tectonique qui contient la France.

On se souviendra aussi de sa dernière rebuffade à la fin de mon cours: "J'la f'rais pas, vot' punition**, passque chépas ske c'est une biographie" (c'est à vous faire passer l'envie de trouver des punitions pédagoguiques). Je lui ai en vain recommandé l'usage d'un dictionnaire, elle a tourné les talons avec la grandeur de Bérénice...

Titus, largue-la, conseil d'ami.

Pitou G.

*En mettant en lien cet article, je me suis rendu compte que j'ai précédemment désigné Gourdiflotte par le doux nom de Beline. Que le lecteur m'autorise à utiliser les deux dénominations en parallèle, parce que je ne peux décemment renoncer à aucune d'elles.
** Curieusement, Gourdiflotte n'appartient pas aux huit élus qui me rendent encore des devoirs...

jeudi 5 juin 2008

Brèves de copies

Le questionnaire de lecture est une vieille pratique, mais elle mérite qu'on la ressuscite de temps en temps parce qu'elle est bien rigolote, même quand les élèves ont lu le bouquin :

Leur religion est : ils sont anglais

Bubby tomba dans l'escalier. C'est ce qu'on appelle un un bubby-boom*

Il tomba en défendant l'escalier (commentaire du prof: c'était bien courageux de sa part)

Il a relevé/réveillé un secret (10 dyslexiques, ça fait beaucoup dans une classe?)

Et là, je vous épargne les catholiques protestants et les musulmans chrétiens (ils le sont plus que les protestants, d'après certaines copies bien inspirées).
Pitou G.

*Mon penchant coupable pour les vilains jeux de mots aurait-il contaminé ces esprits vulnérables? (le bubby-boom a explosé dans trois copies)

mercredi 4 juin 2008

Une explosion de saveurs

À l'instant où la collègue que V. avait invitée à prendre un café a franchi notre seuil, elle a pensé très fort : "Ils utilisent un parfum d'ambiance bien capiteux, ces garçons"

Ce n'était pas un parfum d'ambiance; c'était un incident confiturier. Pitou V. venait de commettre ça :

Attentat à haute teneur glucidique.

Ces jours-ci, mon homme est à plat ventre dans les fraises, comme dirait sa grand-mère. Il a ainsi usé de son influence au plus haut degré de la municipalité pour extorquer à vil prix quatre kilo de fraises au maraîcher du bas de la rue. Obsédé par sa mission fruitière (lui vous expliquera que c'était parce qu'il avait bu trop de café; mais on ne me la fait pas, à moi!), il s'est levé à 1H30 du matin pour cuire sa confiture. En découvrant une série de pots soigneusement alignés dans la cuisine matutinale, j'ai cru un instant avoir mis la main sur un nid de lutins industrieux. Je m'illusionnais : c'est connu, les lutins, ça mange les confitures, ça ne les concocte pas...

Qui a poignardé notre cocotte-minute?

L'histoire nous apprendra que l'on réussit mieux ses confitures la nuit, quand on a les paupières alourdies d'un sommeil indécis, qu'en plein jour : la seconde chaudronnée fut un cataclysme culinaire, une apocalypse ménagère.

Sa collègue n'allait pas tarder à arriver.
Ça ne bouillait pas assez vite.
Pitou V. luta la cocotte. (c'est pour le pittoresque)
Syllogisme du mitron tourmenté.

À peine avait-il tourné la tête qu'un geyser fraiseux jaillit de la soupape, inondant de mélasse fruitée gazinière, murs, hotte et sols fraîchement lavés. Depuis, j'ai l'impression de squatter chez Charlotte aux Fraises...

Stalagtites gourmandes


Pitou G.

mardi 3 juin 2008

Pour le pire et pour le meilleur - op. 2

Ce matin, c'est encore le troupeau de Grelinda qui s'est chargé du pire. Ils ont atomisé un record du monde, celui du nombre minimal de copies remises. Un mois pour lire un +%*@# de bouquin qu'ils étaient allés choisir au CDI (eh m'sieur, L'amour en chaussettes, esksé d'la science-fiction?) et me faire un travail d'écriture à deux balles (quatre extraits du journal intime d'un personnage correspondant à quatre moments cruciaux du roman; un seul objectif : me prouver qu'ils avaient lu le livre).

Et aujourd'hui, tadam, récolte mirifique de huit copies (dont deux avec trois lignes dessus). Moins d'un tiers de la classe. Même Aziate ne m'a rien rendu - pour vous, ça ne veut rien dire, mais pour moi, c'est un ultime rempart qui vient de s'abattre... Aziate, la seule qui en voulait, qui essayait, qui se battait; Aziate, pas la meilleure, mais sans conteste la plus méritante; Aziate a chu... Mais elle, elle a quand même baissé la tête quand je suis passé dans les rangs mendier mes copies (en théorie, c'était censé remonter leur moyenne... ne me demandez pas pourquoi je ne bosse pas pour météofrance, avec des prédictions pareilles). Le pire, c'est que je ne suis même pas sûr que ça la fasse baisser...

Alors forcément, moi qui avais mis de l'eau dans mon vin et décidé de la jouer à la fine pour éviter l'éternel rapport de force (j'étais même parvenu à faire sourire Grelinda et à faire écrire Nikolic - le seul élève au monde qui se sente agressé quand on lui dit "bonjour"), j'ai sorti mon grand jeu de stentor et d'aboiements. J'ai beuglé au moindre murmure pendant qu'ils travaillaient faisaient semblant de faire le travail demandé et que je remplissais une douzaine de carnets de liaison et relevais le nom de ceux qui n'avaient pas le leur pour les coller. Paisible matinée... Mais bon, c'est pas comme s'ils se cramaient les cheveux dans les couloirs (ah? on me dit que si...). Basta pour le pire.


Bon, ce n'est pas la classe des anges, mais ça console un peu :
Voilà ma sélection de florilèges poétiques de la classe que je possède dont je suis prof principal. On aurait pu s'attendre à des merveilles, vu qu'on y trouve quelques poètes (Catul-pas-de-e, Tibulle... on y revient). Je ne dis pas que certains ne s'y sont pas donnés à fond, mais l'impression d'ensemble est nettement moins rafraîchissante que . Ils ont un an de plus et donc moins d'enthousiasme. Il faut dire aussi que les consignes étaient un poil plus austères. Je reste néanmoins surpris par certains poètes qu'ils ont convoqués. Certains sortent un peu des sentiers battus et affirment à travers leurs choix des personnalités intéressantes. Et c'est avec plaisir que j'ai vu des élèves discrets sortir de leur réserve. Oh, rien de bien croustillant (pas de balanophages - ils se souvenaient quand même du destinataire) : je m'attendais à ce que Catul-pas-de-e joue la provocation et je suis presque déçu de sa retenue.

Sans grand étonnement, mon champion reste Tibulle :

Ne vous y trompez pas, ce qui ressemble de loin à un brouillon est en fait un travail très élaboré, et pas seulement dans sa forme. J'ai adoré découvrir ses impressions sur les poèmes qu'il a choisis. Il a parfaitement compris l'esprit de l'activité.

À présent, comparons avec un vrai brouillon. Catul a ajouté à sa marque de fabrique (des ratures partout) une spéciale glam'touch :

La grosse tache de gras (huile ou beurre? j'hésite encore), pour un effet papier-vitrail. En appréciation, je n'ai pas pu m'empêcher : "décoration ou reste de petit-déjeuner?".
Et bien malgré ses deux jours de retard et sa présentation digne de la Cour des miracles, il ne s'en sort pas si mal... Je vous laisse les bulles de Tibulle.




Pitou G

P.S. : Saurez-vous dénicher la référence-pas-de-e télévisuelle qui se tapit quelque part dans ces lignes?
P.P.S. : Ce blog est en train de virer méchamment "loisirs créatifs"

lundi 2 juin 2008

Sur le grill

Tibulle arrive en retard et espère se glisser subrepticement dans la classe. Pas de chance, lui, je remarque ses absences. Il en est quitte pour aller chercher un billet de retard. La main adroite du surveillant de garde a tracé un curieux enchevêtrement de lettres. Je lis : problème de cuisson.

C'est vrai qu'il est un peu cru, ce garçon (mais après quatre ans passés au four, nul doute qu'il sera très comestible).

Je vous laisse le soin de deviner ce qu'il y avait d'écrit en vrai sur le billet d'entrée!

Pitou G.

Une femme qu'on n'oublie pas

Pitou V : Mercredi après-midi, j'ai invité une collègue à prendre un café à la maison. Tu vas voir, elle est super sympa.
Pitou G : Elle s'appelle comment?
Pitou V : ... (silence gêné, drôle de grimace)
Pitou G : Ben, elle s'appelle comment?
Pitou V : Mais comment elle s'appelle déjà, cette gourde?

Voilà que ça le reprend!

dimanche 1 juin 2008

Et la lumière fut...

La semaine dernière, nous avons passé un week-end à la ferme. Ce serait trop bête d'aller en Picardie sans rendre visite à Jebaguenaudedanslespâturages. On n'a pas si souvent l'occasion de rire (et en plus, y a une piscine).

Après avoir passé une excellente soirée, exténués par nos fous-rires, nous décidons d'aller nous coucher. Pas de crucifix dans notre chambre, la maîtresse de maison nous ayant confessé que, lorsqu'elle était enfant, sa plus grande terreur aurait été d'assister à une apparition de la Vierge (n'emmenez pas vos enfants à Lourdes, vous leur épargnerez bien des ciboires déboires). Pas de crucifix, mais un simulateur d'aube, tout ce qu'il y a de plus profane. Pour s'offrir une petite grasse matinée (en priant pour que Jebaguenaude puisse contenir ses enfants assez longtemps pour cela), nous nous assurons que l'appareil n'est pas programmé. Et zou, au lit!

Au petit matin, je suis réveillé par une lumière intense qui irradie à travers mes paupières fermées. Il est sept heures, et c'est le zénith sur mon chevet. J'entre-ouvre un oeil, manque de me brûler la rétine et aperçois mon homme en train de triturer le simulateur d'aube. Tiré de son sommeil par des chants d'oiseaux, Pitou V - qui a contracté l'habitude de se réveiller avec une cochonnerie de CD "ambiance naturelle" - a cru pouvoir les éteindre en bidouillant le réveil. Sauf que c'était de vrais oiseaux, et qu'il ne s'en est rendu compte qu'au plus fort de cette canicule artificielle.

Les mésanges ne sont pourtant pas les plus encombrantes des habitantes de nos campagnes. Pas comme le sanglier qui est venu piquer une tête il y a quelques mois dans la piscine...

Mais non, il n'est pas mort; il a juste bu la tasse - heum...

" Comme quoi, j'ai bien eu raison d'insister pour qu'on y mette des marches. Avec une échelle, il serait toujours en train de barboter dans l'eau claire..." conclut la belle des champs.

Pitou G.