Le blog coruscant et capricant d'un couple de garçons en retour d'exil

dimanche 22 mars 2009

Y.F. vs Elmatador

Dans La Journée de la Jupe, Sonia Bergerac, prof de lettres interprétée par Isabelle Adjani, pète un câble pendant un cours chaotique avec des élèves ingérables qui l'ont eue à l'usure. Mais le film fait allusion à un autre motif de cataclysme : le collègue puant.

À Haquenée, globalement, ça se passe très bien avec les collègues. Il existe bien sûr un régime d'exception pour Helmut Stachos, qui nous a rejoué sa grande scène du " ceci est un lieu public, et tu es en train d'exprimer ta position" à un collègue qui évoquait d'un air goguenard la lettre d'Obama à Chirac (sachez qu'un sourire en coin est une opinion politique). Le collègue lui a rétorqué : "assise" et la conversation s'est close sur cette pointe absurde. La prochaine fois, je répondrai "assise " à Helmut, quelle que soit sa question.
Il existe une autre dérogation pour Droopy, mais ce n'est pas de sa faute : il est suant au naturel. Pas de bol quand même. Il suffit d'éviter de le croiser et, surtout, d'interrompre toute conversation quand il entre dans la salle des profs. Quel que soit le sujet, il s'incrustera et dira de sa voix traînante et nasillarde (c'est trop pour un seul homme): "Moi, les 4e Enfer, je les supporte plus". Mais tout cela, vous le savez déjà.

La nouveauté, c'est qu'une nouvelle infraction à la bonne entente générale est en train d'émerger, visqueuse grenouille de la honte dans un marais de disgrâce (j'ai une petite envie de métaphore, je dois être enceinte), en la personne d'Elmatador. Et si jusqu'à présent il se tenait à carreau, c'est parce qu'il n'était pas là. À la place, on avait une collègue super-sympa avec qui on pouvait dire du mal en toute amitié, c'était le bonheur. Mais le problème des jeunes collègues d'obédience féminine, c'est qu'elles sont particulièrement sujettes aux natalites. Quand c'est ça, on se console comme on peut : il y a une chance non négligeable pour que le Recto-Rat, en mal de remplaçants titulaires, soit contraint de puiser dans le vaste vivier des étudiants candidats aux concours. Cela avait fonctionné au-delà de nos espérances les plus folles quand une collègue est devenue dépressive (ça donne envie d'empoisonner Helmut, tout ça, mais il ne mange jamais à la cantine) : c'est comme ça qu'on a hérité de Bombinou, qui fait 200 bornes pour assurer quatre heures de cours
Contre toute attente, le Recto-Rat nous a dégotté Elmatador, un remplaçant titulaire expérimenté. Y en a des biens, comme le chante si bien Didier Super, regardez mon homme! Au début, Elmatador nous a plutôt inspiré confiance. À l'usage, il s'est avéré être un mégamix inversé de Droopy (dans sa version "Avec moi, les 4e Enfer, ils sont super") et d'Helmut Stachos (genre "Mon profil a fait surchauffer le fichier Edvige"). Et c'est aussi sciant.

Un matin, Roma-romanella me prend à part, le visage radieux comme à ses treize ans (soupir, nostalgie) :
"C'est vrai qu'Elmatador t'a pris pour un élève quand tu es venu dans sa classe apporter des documents à tes élèves?"

Ce qui est ennuyeux, et légèrement inquiétant, c'est que sur le coup, je ne savais plus si c'était vrai ou pas. Peut-être que je commence à agir comme un robot, un être sans conscience qui dispense son savoir sans y penser et distribue à son insu et à tout va des milliasses de fiches, pendant les cours de ses collègue. Si ça tombe, je suis un zombi. Et comme le zombi que je songeais être, j'ai répondu à Roma-romanella : "Euh... peut-être".
Depuis ce jour, mon amour d'adolescence m'évite dans les couloirs : je pense qu'elle croit que je suis alcoolique.

Quelques jours plus tard, j'ai enfin le fin mot de cette histoire en discutant avec YoungFather. Une histoire vieille comme le monde : le téléphone arabe. En fait, c'est YoungFather qu'Elmatador a confondu avec un surveillant. Ce se serait passé de la façon suivante :

Scène 1 - dans la salle d'Elmatador.
YF : Bonjour. Je peux distribuer ces papiers?
Elm : Oui. En partant, tu n'oublieras pas de prendre le bulletin d'absence. Sans traîner.
YF : Je ne suis pas venu pour ça. Je dois juste distribuer ces papiers-là. Un surveillant passera tout à l'heure prendre le bulletin d'absence.

Scène 2 - salle des professeurs.
Elm (entrée fracassante) : J'ai fait une gaffe! J'ai confondu YoungFather avec un surveillant! Trop dur pour lui!

Le détail cocasse, c'est que, juste avant cette méprise, tous deux avaient longuement fait connaissance.

Scène 3 - Elmatador et YoungFather devant la machine à café.
Elm : Je t'ai pas vexé tout à l'heure? Tu sais, moi, quand je suis en classe, je suis en représentation.
YF : Moi aussi. Jusqu'à présent, ça ne m'a jamais dispensé d'être aimable.

Le tout finit sur un malentendu : Elmatador est persuadé d'avoir blessé YF en le prenant pour un subalterne. YF lui reproche de parler sans politesse aux surveillants. Tout cela ne serait pas arrivé si YF portait d'aussi beaux costumes qu'Elmatador.

Pitou G.

4 commentaires:

MamyS a dit…

Je vais finir par craindre le manque du collège... Où je ne suis toujours pas retournée depuis les dernières vacances... Oh que cette belle ambiance me manque....:(... Avantage pour toi qui peux raconter des vraies choses... pas comme certaine qui n'ont rien à dire et le font savoir en une page!;° ;)

laluciole a dit…

et qu'avez vous pensé de "la journée de la jupe" ? (ça m'intéresserait d'avoir un avis de prof là dessus) (ma mère ne compte pas car si je lui pose la question elle va dire "ha là là là là qu'est ce que je suis contente d'avoir quitté ce merdier" ;-) )

Guilitti a dit…

ah ben bravo à romanella, elle vous confond tous les deux ?? pfff pour une amoureuse d'il y a 16ans, je trouve ça très léger !


"assise", j'adore, je retiens !

Phoebe a dit…

laluciole > chez moi ce film fait débat ... moi j'ai adoré, il faut le voir !

Sinon les collègues, c'est vraiment ce qui me manque le moins ... eurck ...