Le blog coruscant et capricant d'un couple de garçons en retour d'exil

vendredi 30 avril 2010

Vengeance

Pardonnez-moi mon père, parce que j'ai bitché.
J'ai été méchant, très méchant. Et en plus, c'était très facile. Mais d'abord, c'est elle qui a commencé.

Elle, c'est sans surprise Cinderella Lalouze (oui oui, je m'en prends aux faibles; il faut dire que l'exemple nous est donné au sommet de l'Etat, alors pourquoi bouder son plaisir?). Ce midi-là, cette dévoreuse d'hommes était à la recherche d'Y, son fiancé du moment qui n'en demandait pas tant. Je le soupçonne d'ailleurs de s'être caché exprès. Mais que voulez-vous, il devait y avoir urgence : il n'avait sans doute répondu que vingt fois à la question qui la tourmentait. Mais je ne savais encore rien du drame qui se jouait.
Il se trouve que par un double caprice du destin, je suis le voisin de salle d'Y et, surtout, le seul blaireau à faire cours pendant la pause méridienne - mes élèves non plus n'en demandaient pas tant. J'étais sans doute en train de divaguer ou de ramer comme un galérien devant un public de ventres gargouillants (à cette heure-là, je rame ou je divague, rarement autre chose), quand soudain je vois la porte s'ouvrir en grand. La configuration de la salle est ainsi faite que je n'ai vu que le grand panneau de bois béer puis se refermer. Vanth, au dernier rang, savait qui se cachait derrière : "C'était Madame Lalouze" annonça-t-elle d'un ton mi-déconcerté, mi-indulgent (être madame Lalouze excuse beaucoup de choses).
"Ah. Madame Lalouze", ai-je répondu en écho interloqué. J'ignore quelle grimace j'ai bien pu faire en reprenant ces mots, mais nous savons tous que je suis une bille en dissimulation. La classe a alors explosé de rire. Au moment où le calme revient, la porte s'ouvre à nouveau et laisse entrer Cinderella de son si caractéristique pas de veau abandonnique.
" Je cherchais Y. J'ai entendu rire alors c'est pour ça, je reviens. Je cherchais Y.
_ Je ne peux pas t'aider, je suis désolé. Tu as regardé dans sa salle?
_ Il n'y était pas. Je suis venue ici pour ça. Je cherchais Y. Et puis j'ai entendu rire. Alors voilà."

Je vous passe la suite de la conversation (faudrait que je relise Comment abréger la conversation avec un somnambule du Professeur Lalune) pour en venir à mon délit de bitchage.
Le lendemain, en pleine leçon de grammaire, la fantaisie me prend d'illustrer le cas de la proposition infinitive de l'exemple suivant, en prenant mon air le plus innocent :

J'entends ma collègue tirer son chariot orange



Vilain Pitou!

pitou G.

mercredi 28 avril 2010

Referendum

Sur Montdepitous, il n'y a que quelques fidèles qui laissent des commentaires et je les en remercie. Aujourd'hui, cependant, j'aimerais faire appel à vous tous, lecteurs plus ou moins occasionnels, et vous soumettre une question. J'ai besoin de vos lumières...

Sur ma page Fessebouc, j'ai supprimé l'adresse du blog depuis que je suis ami avec YoungMother, la compagne de YoungFather (qui, lui, semble être un Fessebouc-sceptique), par mesure de précaution : je ne voulais pas que quelqu'un du boulot ne tombe sur Montdepitous. Il suffit de se souvenir que la disparition du blog de Timy (je suggère ici une minute de silence ou de reniflements bruyants) vient de sa diffusion parmi ses collègues pour s'en convaincre.

Tout cela est plein de bon sens. Pourtant, depuis quelques jours, l'idée fantaisiste de communiquer l'adresse du blog à Cinderella Follet a germé et fait son chemin. J'ai envie d'agir au mépris de la prudence, de partager avec lui la mémoire de Montdepitous. Faut-il attendre qu'il ait quitté Haquenée? Si ça tombe, il s'en foutrait royalement, en plus... Et puis il y a toujours ce risque de fuites.

Jurés, veuillez délibérer (il suffit de cliquer sur écho en bas de cet article et d'écrire "oui" ou "météfou" ou un peu plus si le coeur vous en dit).

Pitou G.

mardi 27 avril 2010

S(ouvent) V(raiment) T(ordu)

Il y a peu, je vous expliquais que chaque professeur trouvait dans la matière qu'il enseigne des subtilités à nulle autre pareilles. C'était compter sans mon audace et ma polyvalence : je me suis essayé aux sciences naturelles (ce n'était pas tout à fait la première fois) et me suis rendu compte que la représentation du monde d'un adolescent était en tout point baroque.

Acte I : Qui a pondu le premier oeuf : la poule ou Ombeline?
C'était pourtant un cours tout ce qu'il y avait de plus ordinaire: des ados, un prof, Victor Hugo et Napoléon le petit.
Sa grandeur éblouit l'histoire.
Quinze ans, il fut
Le dieu que traînait la victoire
Sur un affût ;
L'Europe sous sa loi guerrière
Se débattit. -
Toi, son singe, marche derrière,
Petit, petit.*

"Petit, petit" étant répété à la fin de chaque strophe, il a attiré l'attention:
Fillette : On dirait qu'il appelle un petit animal.
Pitou G. : On imagine bien une fermière distribuer des graines aux poules en criant "petit, petit".
Vanth : Moi, j'aurais plutôt dit des oiseaux!
Pitou G. : Oui. En même temps, une poule, c'est un oiseau...
Ombeline : Quoi? Une poule, c'est un oiseau?

Ombeline est une professionnelle de l'exclamation candide. Je m'apprêtais à mettre gentiment en boîte cette oie blanche quand je me suis aperçu que toute la classe écarquillait les yeux. Avec ma poule-oiseau, j'avais ébranlé toutes leurs certitudes.

Pitou G. : Mais vous pensiez que c'était quoi, vous, une poule?
Charline : Moi, j'aurais dit : un volatile.
Ombeline : Et moi : une volaille! (tu es trop dure avec toi-même, Ombeline)
Pitou G. : Certes, on peut dire ça aussi. Mais une poule, on est d'accord, ça pond des oeufs, ça porte des plumes, ça a un bec et des ailes. C'est donc un oi-seau.

Silence atterré.

Pitou G. : C'est un oiseau. Au même titre que le pigeon, le rossignol, l'autruche et le pingouin.
Bonnemine : Parce que le pingouin, c'est un oiseau aussi?
Médéric : Et le manchot, est-ce que c'est un oiseau?
Pitou G. : Bonne mère! Et si on en revenait à nos moutons?

Une demi-heure après, en quittant la salle, Bonnemine me salua à sa façon : "N'empêche, vous m'avez trop déçue! Pour moi, une poule, ça sera jamais un oiseau!"
Faucon en reparle.


Acte II : sourd comme un pot de vache

Avant d'interpréter la signification de ce bas-relief, il faut déjà être capable de le décrire. Invités à reconnaître les animaux représentés, les élèves se sont heurtés à un léger (et superflu) problème d'identification : en bas au centre, est-ce que c'est un taureau ou un boeuf?

Pitou G. : Comment voulez-vous qu'on le sache : il est allongé!
Vanth : gné?
Pitou G. : Vous, vous n'avez pas l'air de connaître la différence entre le boeuf et le taureau...
Ombeline : Moi je sais. C'est un taureau : il a des cornes.
Demoiselle : Le boeuf aussi a des cornes!
Ombeline : Ah, je suis bête! C'est la vache qui n'a pas de cornes : elle a des oreilles!

Qui explique à Ombeline que les cornets acoustiques ne permettent d'entendre que si on est préalablement équipé d'oreilles? Je crains le dialogue de sourds...

Pitou G.

* "Chanson" (VII,6), Les Châtiments, V.H.

lundi 26 avril 2010

Brève mais musclée (ou Frosty le clown)

Mon coach, Frosty-le-tigre, m'a dit que je serai prêt pour les championnats du monde du culturisme dans quinze jours.
J'ai vérifié : y en n'a pas.







Je crois qu'il s'est fichu de moi.

dimanche 25 avril 2010

Les lauriers de Follet

On ne le dirait pas comme ça mais, avec son caddy orange et ses cols pelle à tarte (sans compter que je viens de lire sur Fessebouc qu'elle "sabille comme les hommes préhistorique" (sic et resic)), Cinderella est une femme à hommes, ce qui peut être très pénible quand on est soi-même un homme.
Etant donné que ses premières amours ne l'ont pas ménagée, il a fallu qu'elle se rabatte sur d'autres cibles moins farouches. Je lui connaissais un petit faible pour le riant D1kerquois qui lui répond toujours très gentiment - et ça l'amuse plutôt, parce qu'il met, dit-il, plein d'ironie dans ses réponses; mais moi qui l'ai déjà entendu parler à Cinderella, j'ai l'impression qu'il y met de la vraie délicatesse (ou alors c'est que je suis aussi quiche qu'elle). Mais son gros coup de foudre du moment, c'est Follet. Il y a une explication légitime à cette brusque adoration : il lui a sauvé la vie son cours.

Ce jour-là, pendant que tous les gens honnêtes travaillaient, Follet papotait avec une surveillante, quand un jeune Phidippidès les interrompit soudain :
"Au secours! Y a Brendan qui a coincé un bouchon d'effaceur dans son plâtre et madame Lalouze qui devient folle!"

N'écoutant que sa grandeur d'âme Rendu avide par l'évocation d'une telle curiosité, Follet, d'un bond, gagna la salle de Cinderella. Il m'a raconté que lorsqu'il est entré, il a vu la collègue figée dans une attitude bizarre, les yeux écarquillés et perdus dans le lointain. Il n'était même pas sûr qu'elle l'ait vu lorsqu'il a discrètement évacué Brendan, son plâtre et son bouchon (une histoire vieille comme le monde de démangeaison subplâtrales). Soit qu'il ait été dénoncé par les gamins, soit que l'oreille bionique de Cinderella ait reconnu son pas, le sauveur n'est pas resté anonyme. Le soir même, il a trouvé dans son casier une intarissable lettre de remerciements. Qu'il est doux d'être un héros...

Pitou G.

samedi 24 avril 2010

La fourberie des cloches

L'anecdote suivante n'est pas de première main : c'est un ragot de salle de gym (puisque je vous dis que ça ne sert pas qu'à se muscler!) que Follet a lui-même recueilli auprès d'une autre personne. Mais je la tiens pour vraie : elle est tellement représentative du Bigboss...

Acte I : En janvier, deux secrétaires avaient apporté des chocolats, pour égayer les pauses café de l'administration. Pour une raison qui m'échappe une peu, les boîtes ont été stockées dans l'armoire du chef, dans l'attente de jours meilleurs, je suppose (le temps que tout le monde digère la dinde aux marrons).

Acte II : Je ne sais pas si on vous a prévenu, mais il se trouve qu'on a eu un peu de neige, cette année. Venir à Haquenée, en plus d'être globalement inutile étant donné les effectifs (-0, comme la température extérieure - voire intérieure, côté salle des profs), tenait de l'exploit pour les malheureux qui entreprenaient de venir autrement qu'à pieds (bottes en caoutchouc de rigueur, c'est sauvage et sexy), en raquette ou en traineau. Le parking était évidemment impraticable. Les différentes instances contactées ont trouvé plein de bonnes raisons pour ne pas intervenir. On ne va pas pleurer : ça nous a fait des vacances à vil prix (c'est à côté de Chamonix). Le Bigboss a cependant fait jouer ses relations (la cousine de son beau-frère a un oncle qui dirige une entreprise de construction, ou un truc dans ce goût-là) et deux messieurs ont passé une journée à tout déblayer sur leurs gros tracteurs. Pour les remercier, il a exhumé de son placard les deux boîtes de chocolats, sans rien dire à personne. Pas de quoi jaser là-dessus. À la limite, c'est dans l'ordre des choses; les boîtes étaient là, elles ont dépanné.

Acte III : Il se trouve que le secret du Bigboss n'était pas si bien gardé : un témoin du détournement chocolatier a prévenu une des secrétaires qui avaient apporté les boîtes - et que nous nommerons Scapina en raison de sa rouerie. Deux mois après les faits, celle-ci s'exclama au beau milieu de la pause café :
"Oh! Ce serait bien le moment de ressortir nos petits chocolats!",
la roublarde. Sans se démonter, le chef s'est levé, a ouvert l'armoire et a fait mine de s'étonner :
"Je ne comprends pas : les boîtes ont disparu!"
Comme le dit le dicton : À Scapin, escarpin de nuit.

Il faut quand même une sacrée dose de gonflerie pour jouer une pareille comédie. C'est sidérant, mais on reconnaît bien le bonhomme! En même temps, je ne l'imaginais pas une seconde aller acheter des chocolats pour remplacer ceux qu'il avait donnés de sa propre initiative. Et à bien y réfléchir, je le voyais assez mal confesser la vérité...

Pitou G.

vendredi 23 avril 2010

La liberté de la presse à cuisse

J'ai promis à Frosty-le-coach que le tigre serait en moi trois fois par semaine, et le plus beau c'est que je m'y tiens à peu près. Et trois fois par semaine c'est ma peau contre sa peau depuis début janvier, je glisse jusqu'à la salle de sport, avec une dose variable de vigueur et d'entrain mais toujours avec détermination. L'astuce est de faire son sac sans réfléchir, sortir de la maison sans se poser de question, marcher droit devant soi en muselant son intellect et se trouver au pied des machines sans rien avoir vu venir. En principe, si vous avez un minimum d'amour propre, vous ne ferez pas demi-tour après avoir lancé un tonitruant salut à Frosty. Des fois, même, j'y traîne Follet et c'est pas toujours facile : ce mec a une provision de prétextes proprement ahurissante. De toute manière, quand il est là, je muscle surtout ma conversation (et j'apprends des trucs propres à faire ressusciter ce blog, merci pour lui, il en a grand besoin).

Parmi les machines du Frosty club, il y en a une qu'on nomme presse à cuisses. Ce nom vous évoquera sans doute un instrument de torture médiéval, mais ce n'est que ça :

L'image vient de , des fois que vous voudriez investir dans la fonte...


J'étais dans la pose élégante du monsieur ci-dessus, tranquille dans mon coin de salle, quand deux mecs à mi-chemin entre la bête de somme et King-Kong sont venus me demander si j'en avais encore pour longtemps. "Que nenni, dis-je (enfin pas tout à fait comme ça), de toute façon, on peut alterner". Joignant le geste à la parole, le Pitou finit sa série de 100 15 et se lève prestement.

"Alors, Bégonia*, je te mets quoi comme charge? 90? 95?
_ Vas-y pour 100, Hortense**!"

Hortense et Bégonia terminent leur série de forçats et, en bons garçons, s'apprêtent à régler l'appareil à ma convenance.

"C'était quoi, déjà, ta charge? 25?
_ Bah non, quand même pas! C'est... 30."

Je me suis rendu compte un peu tard que je m'étais un poil emballé sur le "quand même pas" indigné. Je vais demander à Frosty s'il n'a pas une machine pour regonfler l'ego...

Pitou G.

* Je trouve piquant d'appeler ce Musclor Bégonia, c'est mon petit plaisir de tenancier de blog. Je ne peux quand même pas l'appeler Hortense...
** Voilà pourquoi je ne pouvais pas appeler Bégonia Hortense : on s'y serait perdu.

mercredi 21 avril 2010

Réunion de bulot

L'ennui est une chose pleine de surprises. J'ai découvert récemment qu'on pouvait se faire suer encore plus qu'un rat mort : j'ai tenté pour vous le demi-rat mort. J'ai pourtant assisté à des milliasses de réunions sciantes (là-bas déjà), j'ai cru me pétrifier de lassitude plus qu'à mon tour, m'enfoncer dans la barbitude absolue.

La grand messe avait un intitulé officiel, qui nous a tenu cinq minutes en fin de séance, un intitulé présenté comme secondaire qui nous a occupés un quart d'heure (et dont j'avais eu la primeur plus tôt dans la journée quand j'étais allé déposer un papier chez le boss - sauf que je n'avais pas compris de quoi il pouvait bien me parler) et un objectif secret qui nous a accaparés pendant un siècle et demi. Comme l'a résumé une collègue, on a joué à ni oui-ni non. Le chef voulait nous faire dire qu'on ne pouvait pas organiser un projet qu'il sabote depuis le début de l'année car il ne voulait pas avoir l'air d'imposer sa décision (voir chapitre 2 de la Démocratie pour grands débutants par le Professeur Diskeujveu). Mais évidemment, ce n'est pas facile de faire trancher une assemblée de soixante personnes qui n'ont pas d'avis sur la question d'autant que le sujet tombait comme un cheveu sur la soupe. Cela s'est fini comme on pouvait s'y attendre par une non prise de décision, grandiose.
Pendant ce temps-là, j'ai cru mourir vingt fois par décrochage de mâchoire, oublié mon nom et vécu une profonde expérience spirituelle ("Vis ma vie de poutre"). Pour me raccrocher à la vie, j'ai pris des notes dont je joins l'éloquente copie.

Cliquez sur l'image pour l'agrandir (mais ne la réveillez pas!)

J'ai commencé par écrire à droite tout ce qui me venait à l'esprit. Vous remarquerez que je me suis assez vite spécialisé dans l'alimentaire. YoungFather, mon voisin d'infortune (qui m'a lâché au bout d'une demi-heure de supplice : faut vraiment que je pense moi aussi à faire des enfants) m'a confié le lendemain avoir rêvé de banana split par ma faute (j'espère pour lui que ce n'était pas plutôt une métaphore de son subconscient). Dans la partie gauche de la feuille, vous avez la prise réelle de notes, soit trois lignes et demie, bien loin de rivaliser avec la logorhée en caractères grecs, retranscription phonétique approximative de mes pensées d'alors (les connaisseurs apprécieront). Tout en bas, vous avez le clou de la soirée :

19H30, L'AVEU : "Je suis incapable"
(elle n'a jamais fini sa phrase)

À ce moment-là, le chef avait cédé la parole à son adjointe, ce qui est peut-être la pire chose qu'il ait jamais faite. Très élégamment, il a alors reculé sa chaise et croisé les bras, une façon bien à lui de lui signaler son soutien : "Vas-y ma cocotte, c'est plus mon affaire". Il faut savoir que la chef a l'autorité d'une huître. C'est une femme très gentille qu'on imagine plus assise en tailleur derrière une tisane au gingembre et peyotl qu'à la tête d'un établissement. Dès qu'elle a commencé à parler (de quoi, au juste?), le niveau sonore de l'assemblée a centuplé. Je suis alors suffisamment sorti de ma léthargie pour éprouver un bref élan de compassion, avant de replonger dans le néant. Au milieu du brouhaha, quelques collègues ont souligné les contradictions internes et le double discours de la direction; j'en avais mal pour elle.

Dans les cinq dernières minutes, le chef a fait la liste de tout ce qui aurait lieu lors de nos portes-ouvertes (rappelons que c'était la raison d'être de la réunion, ça valait vraiment le déplacement). Il n'a demandé de précisions qu'à une seule collègue qui a semblé bien démunie et pour cause : elle ne savait absolument pas de quoi il parlait- le chef est un ancien prof, interroger l'élève inattentif est un réflexe dont on ne se défait pas facilement, c'est l'instinct primal. Autour d'elle tout le monde avait l'air de bien s'amuser. J'ai appris après coup qu'elle essayait de me prendre en photo pour immortaliser, je cite, mon "regard de bulot", en maudissant son portable dépourvu de la fonction zoom. Star malgré moi, j'expose au monde le livre ouvert de mon coeur.

Pitou G.

lundi 19 avril 2010

Entre porc et poule

Quelquefois, on ne peut pas lutter contre son destin : autant capituler. C'est comme ça que je me suis retrouvé à manger en face de Cinderella Lalouze. Je n'ai pas eu le coeur d'aller m'asseoir deux places plus loin, même si j'ai prié très fort pour qu'elle ne me raconte pas pour la quinzième fois l'histoire du prêtre qui donne un coup de pied à un chien (ne cherchez pas l'astuce : il n'y en a pas). Il paraît qu'elle compte écrire un livre avec toutes ses petites anecdotes : je ne sais pas si elle a prévu de les raconter trois fois par page, mais je ne voudrais pas être à la place de l'éditeur qui va recevoir le manuscrit. Je devrais lui suggérer d'ouvrir un blog : voir le monde avec ses yeux doit être une expérience à couper le souffle. Trois fois hélas, elle n'a pas d'ordinateur. De toute façon, quand elle se trouve face à un PC, il ne se passe rien : elle médite immobile devant un écran désespérément vierge (je pense qu'il lui faut six cent heures de travail pour rentrer ses appréciations et encore, ça tient du miracle).
Entre mon assiette de crudités et ma raie aux câpres, je n'ai pas eu droit à l'anecdote du prêtre. En fait, je n'ai eu droit à aucune anecdote, parce que le récit du jour concernait un élève dont elle avait oublié le nom :

Cinderella : Comment il s'appelle, déjà? C'est un nom en -OR...
Pitou G. : Victor?
Follet : Isidore? Théodore?
Pitou G. : Hector? Musclor? Escalator?
Follet : Dark Vador? X-or? Matador?
Pitou G : Minotaure?
Bombasse : Il est en quelle classe? (Bombasse n'a aucun goût pour le suspense)
Cinderella : En quatrième bip, je crois.
Follet : Aïe, c'est les miens, ceux-là...
Pitou G. : Paul? (levage de sourcil perplexe)
Cinderella : Ah oui, c'est ça, c'est Paul!
Bombasse : Mais il n'y a pas le son -OR, dans "Paul"! (levage de sourcil itou)
Pitou G (avec l'accent italien): C'est tout Cindelella, ça! Elle roule les "r" comme une diva de la Scala! Paul, Porc, c'est pareil, non?

On ne sait toujours pas ce qui est arrivé au pauvre Paul (peut-être a-t-il fait tomber un stylo), mais c'est tout de même plus agréable de savoir de qui on parle. D'ailleurs, ça a rendu Cinderella toute guillerette!

dimanche 18 avril 2010

Perdus en chemin

À chaque discipline ses petits bonheurs. J'ai mes traductions déconcertantes et les délices de l'étymologie, Follet a la reproduction humaine. Autant dire qu'il s'est taillé la part du lion. Il venait de suivre le parcours des spermatozoïdes jusqu'à l'ovule quand une élève inquiète leva la main :

"M'sieur, ça peut arriver que les spermatozoïdes se retrouvent dans d'autres organes?"
Notez au passage que les adolescents ont une terrifiante représentation de leur anatomie, sac informe où tout communique. Le lecteur doit ici avoir compris vers quelle impasse (l'ovaire?) nous nous dirigeons. Follet aussi, évidemment. Il voit la catastrophe venir et l'accueille sans amusement ni effroi, en grand professionnel. Le flegme incarné.
"Tu penses à un organe en particulier? demanda-t-il.
_ Bah, je sais pas moi. L'estomac, par exemple" (tant qu'à faire, hein, pourquoi pas l'estomac, en effet).
Quelques garçons tiquent un peu. La gamine, elle, n'y voit aucune malice. Aux purs, tout est pur. Follet fut admirable. Il offrit la seule réponse susceptible de rassurer la jeune fille, réponse qui n'est, après tout, qu'un demi-mensonge : "Non, ce n'est pas possible". Surtout, ne pas rentrer dans les détails...
Je vais m'en tenir à mes traductions extraordinaires et laisser à Follet ces petits bonheurs-là.

Pitou G.

vendredi 16 avril 2010

Les Experts à Haquenée - 2

Précédemment dans "Les Experts à Haquenée" : On a occis, gêné, Monica, l'assistante américaine en profitant veulement de son allergie. Mais qui est le coupable? Bombasse la bombasse? Follet le filou? Pitou G. le petit ange? Les gnomes du F.B.I* mènent l'enquête.

Deux équipes rivales sont sur le coup et toutes deux arriveront à des conclusions différentes. Pour la première, mes anciens gnomes, il ne fait aucun doute que c'est moi le coupable. D'où leur vient une telle conviction? Délit de sale gueule : sur les photos, j'ai définitivement une tête de coupable. Pour la seconde équipe, c'est Bombasse le suspect numéro 1 : il porte un bonnet = il est habillé comme un musulman = cqfd. Notez que ce vaurien de Follet s'en tire blanc comme la colombe, malgré sa trogne de voyou, ça se paiera!

L'analyse des pièces à conviction a donné lieu, elle-aussi, à de curieuses dissonances. Voici le message que Monica a laissé sur mon répondeur quelques jours avant sa mort. Le premier qui se foutra de mon "after the biiiiip" rejoindra Follet sur ma liste d'allergiques à éradiquer du genre humain (pour Follet, c'est facile : ça sera le céleri, l'arme du crime) :




Pour la première équipe, Monica m'a fait chanter parce qu'elle connaissait un secret embarrassant, le ton machiavélique de sa voix ne peut tromper personne. Affligeante banalité. La deuxième équipe a émis une hypothèse beaucoup plus audacieuse : Monica a passé la nuit avec moi, elle a trouvé ça super, elle me remercie et elle a même pris des photos, non mais écoutez-moi cette voix de cochonne qui ne peut tromper personne. Et vous, vous en pensez quoi? Entre les deux versions, si j'osais, je dirais qu'il n'y a pas photo...

Dans la dernière phase de l'enquête intervient l'étude d'une lettre que m'a adressée cette sale petite #@%$* de maître chanteur. J'ai hélas eu peu de retours sur les réactions de nos détectives à ce courrier, si ce n'est que l'équipe 2 s'est obstinée à croire en sa brillante théorie. On y apprend juste, sachem sachez-le, que Monica m'a photographié nuitamment dans les rues de ma ville, légèrement aviné, portant pour tout vêtement une coiffe de chef indien. YoungFather, le metteur en scène, a selon moi totalement discrédité son projet en refusant de procéder à cette ultime séance photos. C'est dommage, parce que des clichés de Monica, Bombasse à bonnet, Follet et moi mangeant des palmitos, c'est une contribution mineure à l'art, alors qu'un nu de moi en Sioux alccolique aurait vraiment renouvelé le genre, je trouve. Ne nous plaignons pas : cette négligence m'aura épargné la Cour d'assises.

Pitou G.

*FBI : Face Book Aïe

jeudi 15 avril 2010

Les Experts à Haquenée - 1

J'ai passé deux semaines d'enfer à raser les murs du collège Haquenée : j'étais persécuté par mes anciens gnomes qui, sur mon passage, sifflaient entre leurs dents farouches des "murderer!", "guilty!" et autres "criminal!" Il paraîtrait que j'ai tué Monica, l'assistante américaine. Tu peux me dire pourquoi j'aurais fait ça? Je la croisais une fois par semaine, la malheureuse!

Je les retiens, mes collègues d'anglais! Quand le téléphone a sonné à 22H00 et que V. m'a tendu le combiné en m'annonçant YoungFather (YF), j'aurais dû sentir le coup fourré. Déjà, l'an dernier, j'avais été témoin - celui qui n'a rien vu, bien sûr, parce que je devais répondre en anglais aux enquêteurs - dans une affaire de vol de voiture. En fait, c'était la prétendue victime qui avait tenté d'arnaquer l'assurance. Là, j'ai carrément pris du galon : je suis passé suspect-vedette. Mais ça, je ne le savais pas encore quand YF m'a présenté sa requête : "J'ai besoin de toi pour un projet pédagoguique transdisciplinaire. Il faudra juste que tu enregistres un message de répondeur. On se voit demain, j'apporterai des gâteaux et un appareil photo".

Le lendemain, en salle des profs, chaque nouvel arrivant croyait qu'on arrosait la naissance du petit dernier de YF, alors qu'on trucidait joyeusement. Il a dû répéter son scénario une bonne dizaine de fois : Monica, allergique aux sulfites, meurt d'un choc anaphylactique. Mais qui a versé du vin blanc dans son jus de pomme, mmmmm? Et surtout WHY (âme sciée*)?
Sur les photos, il y a trois zozos qui tournent autour du gobelet de la victime : Bombasse, Follet et moi. Et soudain, c'est le drame : Monica s'écroule, langue pendante... Mais pourquoi, et surtout WHO (êtes-vous mes demoiselles / Est-ce que vous êtes au rendez-vous / Vous devez être encore plus belles / Et vos regards tout aussi doux*)?
Ce n'est pas le tout de faire le zouave sous les flashs en mâchouillant des palmitos : après il m'a fallu enregistrer ce fameux message de répondeur... en anglais. C'était la petite surprise du jour, YF s'était bien gardé de me prévenir la veille (officiellement, il a changé d'avis pendant la nuit). Vous ne croyiez tout de même pas que je parlais français sur ma boîte vocale!

Qui a laissé un message sur mon répondeur? Le jus de pomme était-il dégueulasse à en crever? Monica était-elle assez gourde pour se tromper de gobelet? Y avait-il de l'huile de palme indonésienne dans les palmitos? Existerait-il à Haquenée un être assez pervers pour empoisonner une mangeuse de cheeseburgers? Et si oui qui (un seul me suffira : je ne tiens pas l'alcool)? Vous saurez tout et bien davantage dans le prochain épisode des "Experts à Haquenée" (ça c'est du stripteaser!).

Pitou G.

*Mon humour de métal parle toutes les langues, c'est pour ça que j'ai été casté pour cette délicate mission anglophone.

mercredi 14 avril 2010

Zosiau d’Avril

Il y a d’un côté les hommes qui se font entre eux des poissons d’Avril. Le riant D1kerquois a ainsi fait plancher ses élèves pendant une heure sur un sujet de brevet consacré à la mort d’Olga, la chienne de Michel Druker, sans qu’il soupçonnent une seconde qu’il les menait en bateau. Il faut croire que des questions telles que “Par quels procédés le photographe souligne-t-il l’affection de l’animateur pour sa chienne?” et des articles extraits de Voici.fr n’ont pas suffi pas à leur mettre la puce à l’oreille.
Mon canular a été, lui, un coup d’espadon dans l’eau. il faut dire que sitôt passées les premières mesures de Caesar version latine de Gérard Manset, j’ai commencé à me marrer comme une baleine. J’ai à grand peine retrouvé mon sérieux au moment de leur faire émettre des hypothèses sur le sens du texte. Mais alors que je tentais encore de leur faire croire qu’ils allaient le traduire, un coup d’oeil à Vanth m’a convaincu que le gag était éventé. Personne n’a été surpris de trouver au dos de sa feuille un poisson manuscrit et marqué d’un ΙΧΘΥΣ, mais tous ont trouvé ça mignon. Là-dessus, Follet a débarqué dans ma salle pour me prévenir que mon père avait besoin de mon double de clés de chez lui - en remontant les rangs, j’ai entendu les mômes murmurer que c’était un poisson d’avril, mais non.



Il y a de l’autre côté les chats qui font à leurs maîtres des zosiaux d’avril. Calim-Birdkiller a ainsi ramené une dépouille aviaire dans la cuisine. Je l’y ai laissée le temps d’aller manger des pizzas d’anniversaire chez YoungMother et YoungFather. Quand nous sommes revenus, l’oiseau mort n’y était plus.... Où allions nous le trouver? Dans le dressing? Dans la baignoire? Au fond de la cuvette? Surprise! Inutile de vous dire que nous avons eu un grand frisson avant de nous glisser sous la couette.... Mais pas de plumes entre nos draps. Le lendemain, nous avons retrouvé le cadeau de Calim sous le canapé.

Qui de l'homme ou du chat a le plus d'humour?

Pitou G.

lundi 12 avril 2010

Le printemps des pitous

Vous n’avez sans doute pas idée, vous qui revenez ici un peu par hasard après notre gros mois de silence, du nombre de projets d’articles en cours. Il y en a tellement à mettre au monde que certains ne verront sans doute jamais la couleur du ciel. Montdepitous est une plage des Galapagos où des milliers de bébés tortues courent vers les vagues, guettés par leurs prédateurs à plumes (si Calim-Birdkiller vivait dans le Pacifique-Sud, il y aurait beaucoup plus de tortues dans nos océans, qu’on se le dise!)
Bien sûr, je pourrais reprendre le fil de Montdepitous sans explication, comme si de rien n’était. Le menu détail de notre quotidien n’est pas forcément palpitant, après tout. Mais deux de nos lectrices se sont émues de notre absence. Qu’elles se rassurent : tout va très bien! Haquenée est en effervescence : la direction se surpasse, Follet est tout feu tout flamme, je suis intenable, j’en oublie déjà, hélas... Il y a aussi du neuf dans nos vies. Au moment même où je vous écris, je pulse et glisse en Prius (ce n’est pas moi qui suis au volant, je vous rassure) vers la mer, en quête de blog-bébés tortues.

Ce n’est donc pas un désespérant vide sidéral qui nous a tenus loin des woies du veb. Les créneaux disponibles que me ménage mon emploi du temps à crans d’arrêt, je les comble avec des séances de sport (plus que trois mois pour être sexy avec ou sans maillot). Et le soir, j’ai trop de travail peu de courage pour écrire de bons billets. Quant à mon homme, il est bien trop occupé à s’occuper de moi, à chercher sur le net des voitures/ maisons / maisons d’hôte (ne rayez aucune mention inutile) pour prendre le relai. Avec le printemps, nous devrions reprendre un rythme normal.

Allez, je vous laisse : j’ai plein de tortues à mettre bas (ah ouais, ça pond des oeufs, ces bêtes-là?)

Pitou G.