Le blog coruscant et capricant d'un couple de garçons en retour d'exil

mercredi 7 mai 2008

Beau bun

Samedi dernier, nous avons reçu la visite de Roseline de b. (pas la ministre, la bretonne). Ajoutez à cela un soleil splendide, et vous aurez une petite idée de ce que peut être un vikène délicieux.
Visiblement, un vikène délicieux n'est pas un vikène hyperactif. Rien n'est meilleur que de paresser au jardin avec un bouquin en main (on a même le droit de le lire). Si c'est bien accompagné, c'est encore mieux; même pas besoin d'échanger un flot de paroles.

Ça, c'était pour l'après-midi. Le matin, je l'avais passé aux fourneaux pour régaler ma tablée d'hommes (ah oui, il faut que je vous le confie, quand même : Roseline est un homme) d'une épaule d'agneau au citron confit et d'échalotes glacées*. Après un repas pareil, vous comprenez mieux le glandage post-prandial (brillez en société grâce à votre manuel de conversation: Un mot par jour avec les Pitous)(arrêtez un peu de crâner, je suis sûr que vous ne le connaissiez pas, ce mot, glandage).

Pendant ce temps, Pitou V. était au travail et Roseline étendait notre linge. Je sais, c'est du joli de déléguer ses tâches ménagères aux invités, mais :

- dès que je levais les yeux vers la corde à linge, la chaleur du soleil réactivait les propényls des échalotes (il paraît que c'est ça qui fait pleurer; parce que n'en déplaise à ce site, leur épluchage provoqua un déluge lacrimal). Allez donc étendre votre linge avec une cécité culinaire!

- pour la première fois de ma vie, mon homme m'a sussuré amoureusement au creux de l'oreille : "mmmmm, tu as divinement étendu la housse de couette, elle n'est même pas froissée!" (euh... c'est pas moi, c'est Roseline!)

Comme le frigo était vide Pour finir en beauté la journée, nous avons décidé d'aller manger chez notre Vietnamien préféré. Pour vous mettre dans l'ambiance, je vous conseille tout de suite de cliquer sur le lecteur suivant, en substituant mentalement le mot vietnamien au mot chinois (c'pas facile, je sais). Un grand merci au Vespéral Vincent qui a rendu possible ce miracle auditif, parce que figurez-vous que cette chanson, et bien on ne la trouve pas sur deezer (scandale!) et que je suis aussi habile en informatique qu'une nouille sautée (bonne dégustation).


Dans cette toute petite salle, on est bien loin de la déco qu'on trouve dans la plupart des restaurants asiatiques. Pas de miroirs, pas de murs rouges, pas de fresques kitsch. On ne peut pourtant pas dire que ce soit sobre : une peinture de danseuse attachant ses pointes trône au-dessus d'un piano droit; entre deux colombages sont accrochés des instruments à cordes et une pendule ayant la forme du Vietnam; quelques statuettes de cochons sont disposées sur la cheminée. Il n'y a pas la moindre cohérence dans tout cela, mais on y est bien.

De toute façon, le cadre, on l'oublie dès la première bouchée. Sachez que Roseline, qui tient scrupuleusement le registre des meilleurs samoussas de France, a classé ceux de ce soir-là sur le podium. Pourtant, on les lui a laissés de bon coeur. Pas question de prendre des samoussas quand il y a du beau brun du bo bun au menu. Le bo bun de ce restau, c'est juste une tuerie, un plat qui ne ressemble à rien de ce que j'ai goûté ailleurs sous ce nom. Le reste du repas est à l'avenant, jusqu'au petit rituel final.

C'est tout de même curieux qu'un restaurant qui serve une nourriture aussi fine s'entête à vouloir servir l'alcool à brûler de riz dans des verres à images cochonnes. Le serveur prendra toujours le même petit air gêné : "j'ai toujours peur de confondre les verres". Bah oui : le temps où les dames avaient un inoffensif petit verre siffleur est révolu; les femmes d'aujourd'hui ont aussi de la barbaque au fond du sake. On a déjà essayé de lui dire, au serveur, qu'il pouvait bien se tromper, que ce n'est pas nous que ça allait déranger, il a l'air de ne pas bien recevoir le message. Là, pour lui, c'était simple : vu qu'on était trois garçons, paf, on a plongé nos regards dans trois origines du monde béantes. Enfin, surtout moi... Pitou V et Roseline se sont contentés de tremper leurs lèvres dans le breuvage et m'ont laissé finir leur verre. Là, j'aimerais bien trouver une chute, mais non, j'ai réussi à tenir debout (pardon).


* Pas de panique, ce n'était pas un sorbet d'échalotes : je les avais juste fait revenir dans du beurre et arrosées de vinaigre balsamique. Il y avait aussi des navets, mais j'ai dû les manger tout seul (la vie de mon gosier est passionnante).

Pitou G.

P.S. pour Roseline : je sais que j'ai un peu bouleversé la chronologie. J'invoque pour ma défense les nécessités dramaturgiques.
P.P.S. : j'ai bluffé Roseline par ma dextérité à manier les baguettes. N'y voyez pas malice.

11 commentaires:

Alcib a dit…

L'image porcine ou grivoise du fond du verre servi en fin de repas a sans doute son rôle digestif. En stimulant l'esprit après avoir mangé, il risque moins de céder le terrain au poids de la chair.
Et peut-être qu'au départ les restaurateurs asiatiques louaient aussi des chambres ;o)
Au restaurant chinois, près de chez moi, où je suis si souvent allé avec Hugo, mon petit voisin (un jour la patronne m'a demandé des nouvelles de mon « fils »), on nous servait toujours l'alcool de riz dan ces verres supposément érotiques.
Depuis un bon moment déjà, on nous sert plutôt du porto, dans un verre des plus normaux.

V à l'Ouest a dit…

Peut-être testerez-vous un jour, les p'tits gars, le Bo Bun du Triangle d'Or (la Touffe Dorée pour les intimes) à Nantes. Je ne remets pas en doute la qualité du vôtre, mais le mien est aussi divin.

tirui a dit…

je ne sais pas encore comment je vais m'y prendre mais je vais tâcher de placer post-prandial quelque part, mon blog aura tout de suite une touche élégante et érudite :-)

Anonyme a dit…

Bonsoir,
Mes joues potelées rougissent à la lecture de ce post... cette visite fut effectivement délicieuse, les Pitous savent recevoir...
Au delà de l'honneur de me voir cité dans le seul blog que je fréquente assidûment, je souhaitais réagir à ce magnifique extrait concocté par notre Pitou...
A l'audition, j'ai cru reconnaître le style endiablé de Ginette Garcin, mais une visite sur une webradio spécialisée l'a démenti...
Etonnant d'ailleurs, lors du refrain, j'avais l'impression d'entendre Brigitte Bardot... mais si ! comparez "Je mange avec des baguettes au restaurant chinois" et "Je n'ai besoin de personne en Harley Davidson"...

Gros bisous à tous

Votre Roseline

eponine a dit…

Ah ça non, glandage, je ne connaissais pas ! En revanche, post-prandial n'a aucun secret pour moi : je crois que dans Lolita, Nabokov l'utilise souvent. La coïncidence du mot, de l'oeuvre et du sujet du billet me laisse sans voix...

Guilitti a dit…

alors moi , le glandage, je l'aime matutinal, vesperal, postprandial.. qu'importe !!! il est si rare qu'il n'en est que meilleur. Ces temps çi, il est vespéral et bloguinal...

Alcib a dit…

Glandage, moi je connaissais. C'est le post-prandial que je ne connaissais pas, mais j'avais cru en deviner le sens par le biais de l'italien « pranza »

Anonyme a dit…

Ben voyons , tu nous prends pour qui : "post-prandial" moi aussi , je connais ... On n'est pas des bêtes ... on a un peu de lecture et d'instruction .
Thieffaine ( TAdF)

Les Pitous a dit…

Alcib=> Moi, ça me fait toujours rire.Ça ajoute un côté comique au repas.

Vincent=> La Touffe dorée, un programme alléchant. On aura peut-être l'occasion de t'y inviter pour te remercier de tes récents services ;-)

Tirui=> C'est une excellente idée. A une époque, un blogueur que je lisais se réveillait parfois avec un mot rare en tête. La consigne était que ses lecteurs le glissent dans leurs écrits du jour. Tiens, je me demande ce que devient ce bon khoyot...

Roseline=> Là, c'est moi qui rougit. Jany L. est effectivement un pur produit de la bardotmaniat. Un peu comme Claude Forier est un cloclone (je te renvoie au message du 8 mai).

Eponine=> J'aime bien quand des lecteurs "sans voix" laisse des messages ;-)

Guilitti=> Je l'aime à toutes les sauces, moi aussi (surtout à la sauce cinq parfums de mon restau vietnamien).

Alcib=> Pranza doit descendre en droite ligne de prandium... Il faut absolument que je me mette à l'italien!

Tadf=> Ne sois pas vexé, je sais bien que tu as au moins autant de vocabulaire que moi!

Alcib a dit…

Pour un francophone, l'italien est vraiment une langue facile à apprendre, surtout pour un professeur de langues et de lettres classiques.
La grammaire ressemble beaucoup à celle du français et souvent le vocabulaire est le même, sauf qu'on y ajoute un « a » ou un « o » à la fin (un « e » ou un « i » au pluriel). o)

V à l'Ouest a dit…

Alcib, caro mio, non è sempre cosi facile !