Le blog coruscant et capricant d'un couple de garçons en retour d'exil

samedi 22 mars 2008

Pitou pisteur

Y en a des qui rêvent de safari photo ou de chasses au trésor. Les cons. Ma vie à moi, elle est bien plus frémissante : je cours après des vidéos-projecteurs...

Au collège Haquenée, c'est le grand luxe : on a deux vidéo-projecteurs pour 500 élèves. Comme je n'ai pas de télé, ni de lecteur divers droite DVD dans ma salle, dès que je veux passer le moindre bout de vidéo à mes ouailles, je bondis sur le réseau informatique pour réserver la bête. Après, c'est tout simple : il suffit de louer une mule pour transporter l'ordi portable, le projecteur, les enceintes, la multi-prise et le pop-corn. Ou alors de traverser des couloirs infestés de gluants avec dix sacoches en bandoulière. Une fois dans la salle, au bout de vingt minutes, on peut espérer avoir fini tous les branchements et réglages. Bref, tout va comme sur des roulettes. (conseil : arriver un quart d'heure en avance)

Mais ça, c'est quand les choses se passent bien. Quand on veut faire du zèle technologique dès 8 heures, il faut prévoir son coup : il faut se procurer la clé du centre de documentation pour accéder à la réserve, vu que ma collègue commence un peu plus tard. On va dans la loge de madame Accueil, on ouvre la tirette secrète où se niche la clé de la boîte à clés; on ouvre la dite boîte que l'on explore en quête du bon trousseau; on repère sur le-dit trousseau les deux clés nécessaires pour accéder à la réserve. Après tout roule : suivez le mode d'emploi détaillé dans le paragraphe précédent. (conseil : arriver une demi-heure en avance)

Mais ça, c'est quand les choses se passent bien. Parce que vous avez beau avoir réservé le matos trois semaines à l'avance (bon, là, je gonfle les chiffres : prévoir, moi, je sais pas faire), il faut savoir qu'aucune règle ne tient plus en période de conseils. Parce qu'au mois de mars, le vidéo-projecteur, il lui prend l'envie d'aller se balader le soir... Après avoir constaté que la réserve était vide, redescendez en trombe à la loge, forcez la boîte à clés, embarquez les clés de toutes les salles où se sont tenues des réunions. Remontez au premier, constatez que les portes étaient déjà ouvertes vu que c'est l'heure du ménage : "Bonjour madame, avez-vous vu un dangereux fugitif électronique?". Nada. Redescendez à la loge, jetez les clés surnuméraires dans la boite à clés et suppliez Madame Accueil de vous ouvrir le bureau du boss. Le vidéo-projecteur est là. Joie et allégresse, bisou à Mme Accueil. (conseil : arriver une heure en avance ou prendre une chambre au collège).

Mais ça, c'est quand les choses se passent pour le mieux. Vous êtes arrivé haletant et tout dégoulinant de sueur devant votre salle. La sonnerie a évidemment déjà retenti. C'est cool : vous allez pouvoir effectuer tous vos branchements dans l'urgence et sous des yeux goguenards, tout en gérant un groupe d'adolescents (en même temps, à 8H, ils dorment). Vous leur donnez une mini-tâche à accomplir pendant que vous déballez votre monstrueux attirail*. Une vague intuition vous transperce : tout cela va mal finir. Vous frissonnez soudain à l'idée que vous avez oublié chez vous le DVD.
Il est bien dans le cartable; il faudrait voir à arrêter de jouer à se faire des frayeurs, grand fou... Vous avez presque envie de sourire : c'est pas si compliqué, cette installation. D'ailleurs, il ne vous reste plus qu'à brancher le câble d'alimentation du vidéo-projecteur. Dans ma main gauche, petit bitonio; sur l'appareil, emplacement pour gros bidule : cherchez l'erreur... En les "rangeant", le boss a interverti la prise de son portable et celle du réflecteur. Pas moyen d'allumer quoi que ce soit, à moins de tomber in extremis sur un gisement de silex.

Grosse suée, bouillonnement de moins en moins intérieur, rugissement sauvage, vol d'enceintes à travers la pièce, mômes tétanisés. Je dois renverser le contenu de mon sac pour retrouver une liasse de photocopies que, par miracle, j'avais préparées à l'avance. Il est huit heures dix, vous avez déjà basculé en mode "créature de l'enfer" (une fumée noire s'échappe encore de vos naseaux). A la fin de l'heure, vous avez retrouvé une tension normale et avez même esquissé un début de sourire - il faut dire que les disciples ont marché sur des oeufs. Et au moment de refermer la porte derrière vous, vous vous rendez-compte qu'il vous aurait suffi de traverser le couloir, la salle d'en face, vide, étant tout bien équipée...

Alors vous comprendrez que, moi, les safaris, je m'en proute!

Pitou G.

* bah quoi?

3 commentaires:

Anonyme a dit…

chapeau bas monsieur !
et on comprend plus tard que les eleves sont des cancres ........

Anonyme a dit…

Héhé! c'est exactement ça. Sauf que je ne l'ai vécu que du côté élève... Il y a d'ailleurs une question que je me suis toujours posée: est-ce que j'ai eu des professeurs particulièrement sous-doués ou est-ce un syndrome du professeur que de ne pas savoir faire fonctionner la télé? (Ma phrase est tordue, je m'en excuse)

V à l'Ouest a dit…

C'est criant de vérité.