J'aimerais passer rien qu'une journée dans la peau d'un non-francophone pour savoir, enfin, si à mes oreilles le français tinte comme une belle langue. J'allais écrire objectivement mais ça, évidemment, ça ne sera jamais possible, même en admettant que je ne comprenne plus ma langue maternelle.
Je peux juger de la beauté de l'italien, du japonais ou du swahili, de n'importe quel idiome que j'entendrais pour la première fois, mais pas de la langue que je pratique sans même y penser. Le sens fait obstacle. Comprendre fait obstacle.
Demandez à un francophone de vous donner le mot le plus beau de sa langue, et il vous répondra à tous les coups quelque chose comme amour. Mais c'est l'idée, pas le mot qui lui plaît, soyez en sûrs! Qu'ont de charmant les sonorités du mot amour? Et quel est le mot que, moi, je trouve le plus beau parmi tous ceux dont j'use (et que j'use) sans les écouter? Je n'en saurai jamais rien, c'est bien le drame : il faut ne pas comprendre pour apprécier. Il me faudrait un français sans message.
Un français sans message? Ça veut dire qu'en écoutant des mots piochés au hasard et des propos absurdes, je vivrais l'expérience du non-francophone découvrant le français pour la toute première fois? Il faut qu'un sens préside à l'organisation des mots - sinon, ce n'est plus une langue, la situation est faussée et l'expérience n'a plus de valeur -, mais il faut qu'il me soit inaccessible.
Est-ce qu'en répétant mille fois un mot jusqu'à le vider de sa substance, jusqu'à ce qu'il sonne de façon exotique à ces oreilles immunisées, jusqu'à ce qu'il ne soit plus qu'un amas de syllabes étrangères, je pourrais approcher cette écoute naïve qui me fait défaut? Que ça en ferait des mots à ânonner! Sans compter qu'il faudrait aussi répéter des phrases, des textes, des livres même pour évaluer la beauté de ma langue...
Ce qui nous est le plus proche est le moins évident.
Il y a peut-être un moyen d'entendre sa langue comme si c'était la première fois, d'apprécier son phrasé et ses sonorités avant même que d'accéder au message qu'elle délivre. Et nous en avons-tous fait l'expérience. L'avez-vous trouvé?
Pitou G.
P.S. : Ça rend philosophe, hein, d'écouter l'Eurovision!
Je peux juger de la beauté de l'italien, du japonais ou du swahili, de n'importe quel idiome que j'entendrais pour la première fois, mais pas de la langue que je pratique sans même y penser. Le sens fait obstacle. Comprendre fait obstacle.
Demandez à un francophone de vous donner le mot le plus beau de sa langue, et il vous répondra à tous les coups quelque chose comme amour. Mais c'est l'idée, pas le mot qui lui plaît, soyez en sûrs! Qu'ont de charmant les sonorités du mot amour? Et quel est le mot que, moi, je trouve le plus beau parmi tous ceux dont j'use (et que j'use) sans les écouter? Je n'en saurai jamais rien, c'est bien le drame : il faut ne pas comprendre pour apprécier. Il me faudrait un français sans message.
Un français sans message? Ça veut dire qu'en écoutant des mots piochés au hasard et des propos absurdes, je vivrais l'expérience du non-francophone découvrant le français pour la toute première fois? Il faut qu'un sens préside à l'organisation des mots - sinon, ce n'est plus une langue, la situation est faussée et l'expérience n'a plus de valeur -, mais il faut qu'il me soit inaccessible.
Est-ce qu'en répétant mille fois un mot jusqu'à le vider de sa substance, jusqu'à ce qu'il sonne de façon exotique à ces oreilles immunisées, jusqu'à ce qu'il ne soit plus qu'un amas de syllabes étrangères, je pourrais approcher cette écoute naïve qui me fait défaut? Que ça en ferait des mots à ânonner! Sans compter qu'il faudrait aussi répéter des phrases, des textes, des livres même pour évaluer la beauté de ma langue...
Ce qui nous est le plus proche est le moins évident.
Il y a peut-être un moyen d'entendre sa langue comme si c'était la première fois, d'apprécier son phrasé et ses sonorités avant même que d'accéder au message qu'elle délivre. Et nous en avons-tous fait l'expérience. L'avez-vous trouvé?
Pitou G.
P.S. : Ça rend philosophe, hein, d'écouter l'Eurovision!
9 commentaires:
C'est l'approche de ton anniversaire qui t'incite à redécouvrir l'émotion des premiers mots entendus à ta naissance, alors qu'ils n'étaient que sons. Dans la langue maternelle, le plus beau nom n'est-il pas celui qui le précède ?
j'ai un CD d'enfances et musique, appelé "virelangue" dans lequel on joue avec les sons, les phrases, les mots.. les "kabulanolak? l'anolakabulo" et autres "souzunarbrevolètunestel" : on se laisse bercer, le sens vient ensuite.. mais ces mini phrases ne refletent pas la langue française dans son ensemble..
Quant au mot amour, la sonorité m est douce. L'est-elle universellement, ou la trouve-t-on douce, nous, français, car elle se retourve dans aimer, maman, mignon, murmure ... ???
"Amour" n'est pas un beau mot. Enfin, tel est mon avis. Ce que j'aime en linguistique, c'est qu'on apprend plein de mots bizarres dont on ne comprend pas le sens, et la première fois qu'on les entend, on peut les trouver jolis indépendamment du sens. Il y a de beaux mots dont le sens n'est pas beau et inversement. A l'oreille, on sent si ça nous écorche les tympans ou pas. Après, je ne sais pas s'il n'y a pas une part d'inconscient qui dicte ce genre d'appréciations, comme tu le dis.
Et comprendre, à mon avis, n'est pas seulement un obstacle à l'appréciation d'une langue. Comprendre le fonctionnement et les articulations d'une syntaxe, par exemple, peut aider à trouver une langue plus ou moins belle. C'est comme ça que je peux dire que l'allemand est une belle langue, même si phonétiquement, ce n'est pas tout à fait ça...
En tout cas, ton post est vraiment intéressant: j'aime beaucoup ce genre de questions existentielles :)
Euuuh, non, je ne sais pas quel est ton truc ???
Par contre, je me suis très souvent amusée, plus jeune, à répéter des mots jusu'à ce qu'ils ne veulent plus rien dire, qu'ils ne soient qu'une suite de syllabes sans sens. Et c'est très bizarre alors, on a l'impression de ne plus connaître ce mot, ou de tromper en le prononçant...
Je ne sais pas quel est le plus joli mot à entendre, pour moi, mais je sais quel est le plus drôle pour moi : c'est BIGOUDI.
Ce mot, indépendamment de son sens, me fait rire !!!!
Remarque, je trouve mon prénom assez mélodieux, maintenant que j'y pense... *dit-elle modestement !!!*
C'est quand ton anniv ?
Oh ben non, c'est bon, je sais !
;-b
non je ne pense pas non plus que "amour" soit un mot phonétiquement joli. Par contre j'aime beaucoup la sonorité du mot "Salsepareille", je trouve ça très gai, très sautillant. Surement une influence néfaste de Gargamel.
Tatiana, qui depuis le temps qu'elle vous lit sans rien dire, s'est dit qu'elle allait poster un message qui ne sert à rien!
DE la musique avant toute chose!la musique de la poésie quand les mots se font lourds,vidés de leur sens ou saturés de sens,trop entendus,usés par trop de répétitions,quand ils deviennent trop "utilitaires",gris tristes et mornes,enchante, nourrit,transporte, berce:c'est là sans doute la vraie langue "maternelle"!
Comme Inci je ne trouve pas le mot "amour" phonétiquement, ou plutot musicalement beau.
mais "Tintinabuller" j'adore!
cependant je crois que la langue est "belle" quand elle est riche de mots, quand la syntaxe donne le sens, quand la ponctuation peut tout changer... la langue est belle quand on sait l'utiliser en fait!
Comme pour beaucoup d'entre vous, les sonorités du mot amour ne m'enthousiasment pas, mais le hasard qui les rapproche de la mort est intéressant.
Comme pour Ulysse, je crois que le seul moyen d'entendre sa langue comme pour la première fois c'est la poésie lue à haute voix, parce qu'elle n'est pas immédiatement intelligible.
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