Le blog coruscant et capricant d'un couple de garçons en retour d'exil

jeudi 23 avril 2009

J'envie ronnement (c'est un titre, ça?)

Ma chère belle-mère me disait tantôt d'un air coupable, alors que nous comparions l'état de nos lessives (ah, le ménage de rentrée printanière et ses satisfactions!), "c'est mal, la mienne est au sèche-linge." Cette remarque - que je ne manque pas de me faire quand j'agis de même - me paraît symptomatique de notre époque. Je veux parler non pas des méfaits du sèche-linge mais de la culpabilisation qui envahit maintenant le consommateur, sommé de trier ses déchets et d'acheter vert. Soyons clair, je n'entends pas discréditer la politique des petits gestes, mais m'interroger sur le glissement qui s'opère de l'éthique à l'(auto) culpabilisation .

Il m'arrive souvent de passer pour l'écolo de service, caution morale (rien que cela) ou gentil illuminé. Cette expérience n'a rien d'exceptionnel, elle est partagée par quantité de personnes qui affichent leur engagement, même modeste, en faveur du respect de l'environnement. Il y a toujours quelqu'un pour vous renvoyer gentiment à la figure vos incohérences. C'est un processus d'autodéfense bien compréhensible: "Qui es-tu pour me faire la morale? Es-tu irréprochable? Non, bien sûr." Cela peut prendre des formes absolument incongrues, comme cet artisan contre qui je luttais pour qu'il ne nous vende pas de fenêtres en plastique et qui au cours de nos nombreux échanges m'avait dit: "Et dans votre parapluie là, vous croyez que les baleines sont en bois?" A noter qu'il avait fini par s'excuser plus tard, en reconnaissant que j'étais véritablement engagé et pas juste un emmerdeur (bon, un peu tout de même).

Soit, il faut donc être parfait en ce domaine pour émettre une objection. Mais la perfection environnementale, c'est pour le moment impossible, sauf à se marginaliser. On ne peut pas être à la fois en dehors et en dedans, et si je veux être en dehors, c'est que je suis un extrémiste qui refuse de vivre dans le monde moderne, et vous comprendrez qu'on ne va pas retourner à l'âge des cavernes. Fin de la discussion: marche avec le progrès ou crève et puisqu'il est trop tard, alors autant en profiter.

Heureusement, ce type de discours tend à disparaître, rendu intenable à mesure que la situation de notre monde se révèle intenable et que s'élèvent plus nombreuses les voix pour le crier. On peut vivre avec ses incohérences en cherchant à les résoudre. Hélas, la stratégie du cheval de Troie, le combat à l'intérieur du système pour le modifier, a trouvé sa réplique marketing, le greenwashing, dont se pare à tort ou raison toute entreprise qui verdit son image et clame les vertus écologiques de ses produits. Ainsi British Petroleum est devenu Beyond Petroleum (Au delà du pétrole... qu'y a-t-il?), Lexus vante les mérites de 4x4 hybride émettant bien plus de co2 que de bêtes petites cylindrées. L'on pourrait multiplier les exemples à l'infini, d'autant que ces vertus écologiques sont plurielles: les allégations environnementales sont donc pléthoriques. Voyez plutôt: consommation d'énergie en cours de vie et à la production, emploi de matériaux naturels/recyclés/recyclables, moindre toxicité sur la faune et la flore (et donc sur nous), etc. Pour qu'un produit soit écologique, il faut envisager de nombreux paramètres. Par exemple, une chaudière au gaz récente, de bonne conception et bien entretenue, ne polluera pas l'air (la combustion du gaz est propre) mais dégagera du CO2 dont on sait le rôle dans le réchauffement de l'atmosphère. Alors, peut-on dire que le chauffage au gaz est écologique? Sans doute que non, mais c'est un moindre mal, surtout si l'on prend certaines précautions (isolation, régulation, etc.)

Mais alors, quelle est l'issue?
L'on parle beaucoup des objecteurs de croissance, souvent pour les caricaturer. Pourtant - est-ce l'effet du prisme médiatique - on sent que le principe du "Moins mais mieux" gagne du terrain. Les adeptes de la simplicité volontaire semblent progresser, par contrainte économique ou conviction. La question se pose alors: à quoi suis-je prêt à renoncer pour vivre mieux? Ce qui est nouveau, pratique, facile, est-il bon pour moi, mes proches, le vivant?

Heureusement, le manichéisme n'a pas cours dans ce domaine et nombre de produits et techniques valent d'être conservées: pour prendre un exemple terre-à-terre, le lave-vaisselle (bien rempli) semble avoir plus d'avantages que d'inconvénients. Finalement, la première contradiction à résoudre serait celle-là: consommation joyeuse et opulente VS écologie austère et contraignante.

Je sens bien que j'ai été long, sans doute circulaire dans ma réflexion, je me demande ce que ce texte vous apportera, je remercie donc le courageux lecteur arrivé ici à qui j'ose poser encore une question: et toi, qu'en penses-tu?
V.

16 commentaires:

Ashley a dit…

Je pense qu'un geste est un geste ( de rien, vraiment) et que même si ça semble anodin, si on est 100 millions à faire le même truc anodin, ça finit par peser.

Et je trouve que l'écologie "imposée" passe nettement moins bien que celle qu'on choisit. Exemple: ça me fait ch... au possible de trier les déchets, verre d'un côté, cartons et plastiques de l'autre et le reste ailleurs, d'une part parce que ça prend plein de place dans l'appart et qu'à 6000€ le m², j'aimerais bien en faire autre chose qu'une déchetterie et ensuite parce qu'en immeuble, suffit que le vieux du 1er qui pige rien jette sa poubelle normale dans la poubelle jaune pour que le tout se retrouve finalement mélangé dans la poubelle verte. Donc je trie verre d'un côté, et tout le reste dans la poubelle normale. Et j'attends que le vieux fasse la sieste pour aller mettre le verre à la poubelle dans la cour qui résonne, mais c'est une autre histoire.

Donc en gros je dis OUI aux gestes qu'on choisit et NON à ceux qu'on nous impose. Et ça fait longtemps que j'ai arrêté de culpabiliser, suffit d'aller faire un tour aux US pour se sentir plus vert que Nicolas Hulot et le Géant Vert réunis. Et j'ai pas de bagnole, je me déplace à pied, à vélo ou en transports en commun. Alors je proute les culpabilisateurs et oualà. (et je me chauffe au gaz avec une chaudière pourrave, mais c'est pas ma faute, je suis locataire opprimée par les salauds de proprios bourgeasses)

Les Pitous a dit…

Chère Ashley, cher lecteur qui s'apprête à mettre un commentaire, j'espère avoir montré que je ne voulais pas (plus?) culpabiliser autrui. Puisqu'on parle des déchets, mieux que le tri, il y a la réduction à la source: refus des produits suremballés (et surpayés), minidoses et autres arnaques pratiques, préférence donnée au vrac et aux produits peu transformés... Quant aux USA,rappelons que si tous les Terriens consommaient autant qu'eux, il nous faudrait 10 planètes, l'empreinte écologique d'un européen correspond à 4 planètes.

Kira a dit…

Tant que le soleil brillera, l'espérance illuminera nos coeurs.

Les Pitous a dit…

Kira/Y. Yokono, je reconnais bien là ton optimisme et ton sens de la poésie... Merci!

joelle a dit…

Matthieu Zeller, sors de ce corps !

Béné a dit…

Paix à son âme :(
Il était pénible et il jouait mal, mais physiquement...
Ah ? L'acteur n'est pas mort par contre ? génial :D

V à l'Ouest a dit…

J'ai abandonné la lecture au quatrième mot, mais ça a l'air vachement intéressant: je referai une tentative avec les idées plus claires.

Thieffaine a dit…

Bon, moi, franchement , je me fiche complètement de l'écologie . Je trie ça c'est vrai, et je fais attention à ne pas mélanger les différents tris . Mais cela ne va pas plus loin ! J'ai une petite voiture , ,parce que c'est pratique, mais j'allume à giorno chez moi . En ce moment , outre ma lampe sur le bureau , 500 watts brûlent dans l'halogène car j'aime voir clair . Je crois que le grand plasma doit dépenser dans les 450 watts ...Mais alors les villes qui arrosent leurs pelouses et entretiennent les ronds-points , et à Noël la débauche de lampes...et les déodorants qui ne servent à rien , et les parfums inutiles... et les marqueurs en feutre sur les tableaux blancs , plus coûteux que les craies, et les kleenex, et les nappes en papiers , mais aussi certaines aiguilles pour diabétiques ( j'en use) de plus en plus sophistiquées et coûteuses, mais inutiles et je pourrais continuer à longueur de pages.

Bref ... c'est la société qu'il faudrait changer , et je n'en ai pas envie , donc je gaspille et je pollue, mais en le sachant bien et en l'acceptant sans remords . Il y a tant à changer avant que je ne fasse quelque chose qui sera vraiment utile.Vous , les Pitou, vos après-rasages,( j'applique la nouvelle règle orthographique ) votre machine à café, et tant d'autres choses, êtes-vous prêts à les abandonner ?


Amicalement ...

TAdF.( qui n'éprouve pas de remords )

Les Pitous a dit…

-> Joëlle, Béné: c'est de bonne guerre de faire référence à notre éternel PBLV!
-> VAO: je reconnais que ce n'est pas le texte le plus facile à lire.
-> TAdF (et Ashley): je crois que j'ai manqué mon but. Je n'attendais pas que chacun dise "ce que je fais ou pas" avec ou sans culpabilité. On verra plus tard pour l'enthousiasme et la cohésion.

Ashley a dit…

Je me suis un poil emballé, mais c'est because je déteste les culpabilisateurs, dans ce domaine-là comme dans les autres (et aussi parce que j'ai pas trop les yeux en face des trous), ça me rend dingote un peu, mais je referai pas...

Thieffaine a dit…

Mais si , je répondais parfaitement à la question V .je relève qquns de tes passages : "Je veux parler non pas des méfaits du sèche-linge mais de la culpabilisation qui envahit maintenant le consommateur, sommé de trier ses déchets et d'acheter vert. Soyons clair, je n'entends pas discréditer la politique des petits gestes, mais m'interroger sur le glissement qui s'opère de l'éthique à l'(auto) culpabilisation ."

Donc, je ne culpabilise pas , et je donnais des exemples .


Et puis un dernier passage : "je remercie donc le courageux lecteur arrivé ici à qui j'ose poser encore une question: et toi, qu'en penses-tu? "


J'ai donc répondu .


Cependant V Je te comprends parfaitement , et après certaines discussions que nous avons déjà eues, je te sais un pur , un vrai ! Et tu as raison . Mais, je ne pense pas exactement de la même façon , c'est tout . Et je le répète , pour que l'écologie marche , il faut un changement complet de société. Il faudrait abandonner totalement la société de consommation , fondée sur le gaspillage , pour entrer dans une société d'économie raisonnée. Nous en sommes très loin !

( je suis en train de piquer 10 minutes dans la salle informatique du bahut, pendant que mes potaches travaillent sur le net ..., honteux , hein ..

Amicalement


TAdF

Béné a dit…

Je ne suis pas tout à fait d'accord avec toi Thieffaine. Enfin, sur le fond, tu n'as pas tort, seul un changement radical de société réglerait la totalité des problèmes écologiques (du moins ceux générés par l'homme). Cependant, reconnaître cela ne doit pas nous empêcher d'agir. Tu fais un peu comme certains à l'extrême-gauche qui rejettent toutes les réformes sociales, même celles de gauche, en arguant du fait que cela ne règle pas le fond du problème, et que la seule vraie solution, c'est la révolution. C'est tout de même moins simple que cela, et une bonne réforme, qui n'est naturellement qu'un élément de solution et pas un remède miracle, n'est pas inutile. Je pense qu'il en va de même pour les questions écologiques. Un élément de solution vaut toujours mieux que pas de solution du tout.

Thieffaine a dit…

je réponds à Béné sur le post suivant .


TAdF

Guilitti a dit…

voilà, on s'absente 2 jrs, et ce blog vire intello !
non en fait, il est toujours intello !!
mais il vire sérieux...
Moi, je suis POUR tous les gestes écolos qui ne me gonflent pas.
Le sèche linge, ça consomme moins que le fer à repasser qu'il évite, alors zéro mauvaise conscience (sauf par grand soleil et grand vent, où là, à cause de l'écologie, je me tape l'accrochage dehors, alors qu'il y a 10 ans je ne me posais même pas la question). Ampoules basse conso, moon cup, tri dans les superbelles cagette jaune, bleue, vertes offertes par la municipalité, compost dans le jardin, mais.. gros espace qui consomme 11litre pour chercher le pain à 1km500...

pour les craies, merci à Thieffaine : un argument de plus pour lutter contre les tableaux blancs qui puent et fond de la poussière noire qui me maquille tout le visage (alors que la poussière blanche me va à ravir)

Thieffaine a dit…

Ah , mais Guilitti, tout ça , je le fais aussi, sauf les ampoules basse consommation , car elles donnent une lueur blafarde et crépusculaire. Et je fais même mieux ... Je ne possède qu'une modeste Clio 1.2 l ( mais elle a tout d'une grande ! )et je confectionne mon pain moi-même ,' entre parenthèse, il est le meilleur avec la farine ALDI, la moins coûteuse ! ) je n'ai donc , même pas à effectuer 1.5 km pour l'aller chercher.
Mais les Pitou, eux sont des VRAIS écolos, il suffit de suivre les péripéties de la restauration de leur maison pour le comprendre. Il faut aussi savoir qu'ils ne possèdent qu'une voiture pour 2 personnes ! Et une petite ...Qu'ils cuisinent sainement par eux-mêmes. Bref , et c'est vrai , je les admire !Mais , je ne me sens pas capable de vivre comme ça . je suis un" pov mec " de base qui n'écologise presque pas .Mais promis , je vais essayer de tenter de commencer à envisager le moment où peut-être je penserai à envisager de devenir un petit peu plus écolo...( Que de précautions ...) je vais commencer par refuser ces belles aiguilles de piqures pour stylo à diabétiques , pour repasser à la version de base beaucoup moins coûteuse. Mais , j'aimerais aussi que V. explique clairement ce que l'on peut simplement faire pour que nos gestes quotidiens soient plus citoyens . Promis , je le ferai. Il faut dire que depuis hier, je pense à ça. Le billet de V . m'a remué c'est vrai... et il m'a fait prendre conscience de beaucoup de choses. Comme quoi...rien n'est immuable

Amicalement à tous . ( Guilitti on va former une association " contre les tableaux blancs , et pour le retour des craies..."

TAd

Thieffaine a dit…

j'aurais dû mettre " entre parenthèses " Quelle honte !