L'ennui est une chose pleine de surprises. J'ai découvert récemment qu'on pouvait se faire suer encore plus qu'un rat mort : j'ai tenté pour vous le demi-rat mort. J'ai pourtant assisté à des milliasses de réunions sciantes (là-bas déjà), j'ai cru me pétrifier de lassitude plus qu'à mon tour, m'enfoncer dans la barbitude absolue.
La grand messe avait un intitulé officiel, qui nous a tenu cinq minutes en fin de séance, un intitulé présenté comme secondaire qui nous a occupés un quart d'heure (et dont j'avais eu la primeur plus tôt dans la journée quand j'étais allé déposer un papier chez le boss - sauf que je n'avais pas compris de quoi il pouvait bien me parler) et un objectif secret qui nous a accaparés pendant un siècle et demi. Comme l'a résumé une collègue, on a joué à ni oui-ni non. Le chef voulait nous faire dire qu'on ne pouvait pas organiser un projet qu'il sabote depuis le début de l'année car il ne voulait pas avoir l'air d'imposer sa décision (voir chapitre 2 de la Démocratie pour grands débutants par le Professeur Diskeujveu). Mais évidemment, ce n'est pas facile de faire trancher une assemblée de soixante personnes qui n'ont pas d'avis sur la question d'autant que le sujet tombait comme un cheveu sur la soupe. Cela s'est fini comme on pouvait s'y attendre par une non prise de décision, grandiose.
Pendant ce temps-là, j'ai cru mourir vingt fois par décrochage de mâchoire, oublié mon nom et vécu une profonde expérience spirituelle ("Vis ma vie de poutre"). Pour me raccrocher à la vie, j'ai pris des notes dont je joins l'éloquente copie.
J'ai commencé par écrire à droite tout ce qui me venait à l'esprit. Vous remarquerez que je me suis assez vite spécialisé dans l'alimentaire. YoungFather, mon voisin d'infortune (qui m'a lâché au bout d'une demi-heure de supplice : faut vraiment que je pense moi aussi à faire des enfants) m'a confié le lendemain avoir rêvé de banana split par ma faute (j'espère pour lui que ce n'était pas plutôt une métaphore de son subconscient). Dans la partie gauche de la feuille, vous avez la prise réelle de notes, soit trois lignes et demie, bien loin de rivaliser avec la logorhée en caractères grecs, retranscription phonétique approximative de mes pensées d'alors (les connaisseurs apprécieront). Tout en bas, vous avez le clou de la soirée :
La grand messe avait un intitulé officiel, qui nous a tenu cinq minutes en fin de séance, un intitulé présenté comme secondaire qui nous a occupés un quart d'heure (et dont j'avais eu la primeur plus tôt dans la journée quand j'étais allé déposer un papier chez le boss - sauf que je n'avais pas compris de quoi il pouvait bien me parler) et un objectif secret qui nous a accaparés pendant un siècle et demi. Comme l'a résumé une collègue, on a joué à ni oui-ni non. Le chef voulait nous faire dire qu'on ne pouvait pas organiser un projet qu'il sabote depuis le début de l'année car il ne voulait pas avoir l'air d'imposer sa décision (voir chapitre 2 de la Démocratie pour grands débutants par le Professeur Diskeujveu). Mais évidemment, ce n'est pas facile de faire trancher une assemblée de soixante personnes qui n'ont pas d'avis sur la question d'autant que le sujet tombait comme un cheveu sur la soupe. Cela s'est fini comme on pouvait s'y attendre par une non prise de décision, grandiose.
Pendant ce temps-là, j'ai cru mourir vingt fois par décrochage de mâchoire, oublié mon nom et vécu une profonde expérience spirituelle ("Vis ma vie de poutre"). Pour me raccrocher à la vie, j'ai pris des notes dont je joins l'éloquente copie.
J'ai commencé par écrire à droite tout ce qui me venait à l'esprit. Vous remarquerez que je me suis assez vite spécialisé dans l'alimentaire. YoungFather, mon voisin d'infortune (qui m'a lâché au bout d'une demi-heure de supplice : faut vraiment que je pense moi aussi à faire des enfants) m'a confié le lendemain avoir rêvé de banana split par ma faute (j'espère pour lui que ce n'était pas plutôt une métaphore de son subconscient). Dans la partie gauche de la feuille, vous avez la prise réelle de notes, soit trois lignes et demie, bien loin de rivaliser avec la logorhée en caractères grecs, retranscription phonétique approximative de mes pensées d'alors (les connaisseurs apprécieront). Tout en bas, vous avez le clou de la soirée :
19H30, L'AVEU : "Je suis incapable"
(elle n'a jamais fini sa phrase)
(elle n'a jamais fini sa phrase)
À ce moment-là, le chef avait cédé la parole à son adjointe, ce qui est peut-être la pire chose qu'il ait jamais faite. Très élégamment, il a alors reculé sa chaise et croisé les bras, une façon bien à lui de lui signaler son soutien : "Vas-y ma cocotte, c'est plus mon affaire". Il faut savoir que la chef a l'autorité d'une huître. C'est une femme très gentille qu'on imagine plus assise en tailleur derrière une tisane au gingembre et peyotl qu'à la tête d'un établissement. Dès qu'elle a commencé à parler (de quoi, au juste?), le niveau sonore de l'assemblée a centuplé. Je suis alors suffisamment sorti de ma léthargie pour éprouver un bref élan de compassion, avant de replonger dans le néant. Au milieu du brouhaha, quelques collègues ont souligné les contradictions internes et le double discours de la direction; j'en avais mal pour elle.
Dans les cinq dernières minutes, le chef a fait la liste de tout ce qui aurait lieu lors de nos portes-ouvertes (rappelons que c'était la raison d'être de la réunion, ça valait vraiment le déplacement). Il n'a demandé de précisions qu'à une seule collègue qui a semblé bien démunie et pour cause : elle ne savait absolument pas de quoi il parlait- le chef est un ancien prof, interroger l'élève inattentif est un réflexe dont on ne se défait pas facilement, c'est l'instinct primal. Autour d'elle tout le monde avait l'air de bien s'amuser. J'ai appris après coup qu'elle essayait de me prendre en photo pour immortaliser, je cite, mon "regard de bulot", en maudissant son portable dépourvu de la fonction zoom. Star malgré moi, j'expose au monde le livre ouvert de mon coeur.
Pitou G.
Dans les cinq dernières minutes, le chef a fait la liste de tout ce qui aurait lieu lors de nos portes-ouvertes (rappelons que c'était la raison d'être de la réunion, ça valait vraiment le déplacement). Il n'a demandé de précisions qu'à une seule collègue qui a semblé bien démunie et pour cause : elle ne savait absolument pas de quoi il parlait- le chef est un ancien prof, interroger l'élève inattentif est un réflexe dont on ne se défait pas facilement, c'est l'instinct primal. Autour d'elle tout le monde avait l'air de bien s'amuser. J'ai appris après coup qu'elle essayait de me prendre en photo pour immortaliser, je cite, mon "regard de bulot", en maudissant son portable dépourvu de la fonction zoom. Star malgré moi, j'expose au monde le livre ouvert de mon coeur.
Pitou G.
6 commentaires:
oooooh la solitude du prof au fond de la réunion sans fin, sans sujet et surtout -surtout!- sans intérêt!!
Malheureusement, de plus en plus nos établissements (et nos chefs) sont atteints de réunionites aigûes!!!
Fais suer .... plus de glace au congélo, or tu m'as mise en appétit de sucré !
alors moi je me suis éclatée à lire le grec, ravie de voir que je le parle couramment, et très attristée quant à l'état de tes attributs masculins, bien malmenés dans cette réunion...
merci pour ce fou-rire !
je pense qu'à la prochaine réunion, je ferai pareil !! (mais sans certaines expressions néanmoins)
MamyS=> Le plus beau, c'est que notre chef commence toutes ses réunions en critiquant la réunionite. Va comprendre...
Joelle=> LA prochaine fois, ça sera charcuterie, promis!
Guilitti=> καν σα κας λεκουιλ σα κας λεκουιλ λολ ;-)
Tiens, on dirait mes prises de notes en réunion... où je n'écoute jamais rien. A moi aussi ça me casse les couilles.
ἰἀδορ τα λίστ! πάρφωα δίφισλ ἂ δεχίφρέ, ἰαπρέσι σεπενδαν λα πρέζενσε δή εσπρί ^^
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