À notre retour du Grand Sud, dans une gare Montparnasse arpentée à tout va par des troupes de militaires en armes - suis-je le seul mauvais citoyen français que l'omniprésence des soldats (ambiance nuit de folies à Rangoon) inquiète plutôt qu'elle ne rassure? -, pendant que mon homme cherchait son bonheur dans un relais-presse (oui oui, j'ai bien prévu de finir cette phrase un jour), j'ai été abordé par un grand jeune homme un peu bronzé. Quand je dis "abordé", je ne veux pas dire invité à un gala galant avec un bouquet de roses, entendons-nous bien. C'était plutôt "Comment ça va le vacancier?" et vas-y que je te tapote l'épaule, le truc que j'adore, spécialement quand je suis chargé comme une mule bohémienne. Pendant qu'il me déroule son boniment auquel je ne comprends goutte, mon cerveau tourne à plein régime à la recherche d'une astuce pour écourter la conversation (est-ce que "j'ai quelque chose sur le feu" peut faire illusion dans une gare? Allez comprendre pourquoi ça n'a pas marché...). Ce n'est que lorsque je fais tomber ma valise sur son pied que je prends conscience que je dois avoir l'air d'un lapin ligoté pris dans les phares d'un TGV. J'ai même pensé me réfugier dans les bras avenants d'une dame blonde, le visage irradiant de gentillesse sous son béret, le regard glissant amoureusement, de temps à autre, sur sa mitraillette en bandouilière.
Le grand jeune homme a dû s'en apercevoir, parce qu'il a essayé de me rassurer. Il a marmotté une phrase de laquelle je n'ai retenu que "Sapeurs-pompiers de Paris" et "armée" (alors, rassuré?). Je ne l'écoutais pas, tout occupé que j'étais à deviner la raison de la main qu'il venait de reposer sur mon épaule : me parler de la Rédemption qui devrait me permettre d'échapper à la Destruction du monde; me vendre des fanions fluorescents pour financer la kermesse du centre aéré; me proposer des lunettes de soleil Plada... C'est alors que j'ai remarqué un détail insolite : la seule chose qu'il avait avec lui, c'était un bouquin. Bingo, j'étais tombé sur un de ces doux amoureux de la lecture et du contact humain (j'ai bien compris que tu étais très tactile, mon garçon!) qui illuminent leurs journées en offrant un livre à un inconnu, pour partager leurs dernier coup de coeur. Du coup, j'avais peut-être été un peu trop sec en lui affirmant, avant même de savoir ce qu'il me voulait, que je n'étais pas du tout intéressé, non, vraiment, le crack c'est pas mon truc, mais comment croyez-vous que je puisse avoir ce teint de rose fraîche en me bourrant de cocawine?
J'ai risqué un coup d'oeil sur la couverture du don qu'on s'apprêtait à me faire. J'ai aussitôt regretté qu'il ne me propose pas plutôt de signer une pétition pour soutenir le massacre des bébés phoques ou un flacon d'amphétamines. Il voulait me refourguer...
"Euh... si vous tenez vraiment à vous en débarrasser, ai-je suggéré avec un trémolo de panique, vous pouvez le poser n'importe où dans la gare. Je suis sûr que quelqu'un finira par le prendre!"
Pitou G.
Le grand jeune homme a dû s'en apercevoir, parce qu'il a essayé de me rassurer. Il a marmotté une phrase de laquelle je n'ai retenu que "Sapeurs-pompiers de Paris" et "armée" (alors, rassuré?). Je ne l'écoutais pas, tout occupé que j'étais à deviner la raison de la main qu'il venait de reposer sur mon épaule : me parler de la Rédemption qui devrait me permettre d'échapper à la Destruction du monde; me vendre des fanions fluorescents pour financer la kermesse du centre aéré; me proposer des lunettes de soleil Plada... C'est alors que j'ai remarqué un détail insolite : la seule chose qu'il avait avec lui, c'était un bouquin. Bingo, j'étais tombé sur un de ces doux amoureux de la lecture et du contact humain (j'ai bien compris que tu étais très tactile, mon garçon!) qui illuminent leurs journées en offrant un livre à un inconnu, pour partager leurs dernier coup de coeur. Du coup, j'avais peut-être été un peu trop sec en lui affirmant, avant même de savoir ce qu'il me voulait, que je n'étais pas du tout intéressé, non, vraiment, le crack c'est pas mon truc, mais comment croyez-vous que je puisse avoir ce teint de rose fraîche en me bourrant de cocawine?
J'ai risqué un coup d'oeil sur la couverture du don qu'on s'apprêtait à me faire. J'ai aussitôt regretté qu'il ne me propose pas plutôt de signer une pétition pour soutenir le massacre des bébés phoques ou un flacon d'amphétamines. Il voulait me refourguer...
"Euh... si vous tenez vraiment à vous en débarrasser, ai-je suggéré avec un trémolo de panique, vous pouvez le poser n'importe où dans la gare. Je suis sûr que quelqu'un finira par le prendre!"
Pitou G.
7 commentaires:
Alors voila qu'un inconnu t'offre un livre et tu fais le difficile?!...tsstsstss... ça se trouve, t'as loupé un grand moment de culture! ;)
Tu n'es pas le seul à mal supporter ces militaires à mitraillettes dans les gares et les aéroports. Personnellement, ça me met les nerfs en pelote et ça m'effraie. Et ça sert à quoi en plus ? S'il y a une problème quelconque, il vont se mettre à tirer par salves avec leurs pétoires ? Allons donc...
Ce gars qui offre un livre, même CE livre, ça a quelque chose de rassurant je trouve: il y en a qui sont capable de partager et de donner de façon désintéressée.
Ça me fait penser que le temps file à toute allure et que, bientôt, ce sera déjà l'Action de Grâce. Obama, selon la tradition, accordera sa grâce à une seule d'entre elles et toutes les autres qui en auront manqué seront mangées.
mais jamais un inconnu ne m'a offert un livre à moi ! (à part la traditionnelle bible laissée dans le chevet de la moitié des hôtels du monde).
Je ne savais pas qu'ALJ écrivait ; vouala, maintenat je le sais ...
sinon "j'entends mon alarme de voiture qui sonne, je dois vous laisser " peut dépanner, même dans une gare.
C'aurait pu être pire, et si ça avait été la bible ?
Larkéo qui se la joue poursuivie par les paparazzi
Ah les mecs qui soit disant donnent des bouquins à Montparnasse c'est des vraies plaies. Je les déteste. Mais je constate qu'il y a vachement de progrès dans le catalogue des références proposées...
MamyS=> Je suis un sans coeur! Pas de pitié pour les dindes!
VAO=> Et le pire, c'est que ces mercenaires lourdement armés passent leur temps à rire entre eux (en même temps, que faire d'autre dans une gare quand on n'a aucun train à prendre?). Quelqu'un qui rit avec une arme entre les mains, ça me fout les jetons!
Alcib=> Excentricités états-uniennes... C'est là qu'on s'aperçoit qu'eux et nous, nous ne sommes pas de la même civilisation.
LaLuciole=> ALJ est la fille/soeur/fiancée (rayez la mention inutile) d'une journaliste grand-reporter... Je suppose donc qu'elle sait écrire. Ma curiosité ne va pas au-delà.
Larkéo=> La Bible, c'est facile de la refuser : "Laissez tomber : je veux aller en Enfers!"
Ashley=> Tu as eu affaire à eux? Ce sont donc de vrais imposteurs? Qu'y gagnent-ils, à part faire souffrir l'amoureux des livres que je suis?
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