"Qu'est-ce qu'elle peut être gentille!" répète-t-on à son sujet, avec des trémolos apitoyés, avant d'ajouter "et qu'est-ce qu'on peut se marrer!". Cinderella* est une vraie, une authentique, une indécrottable inadaptée. Elle fait partie de cette race de gens qui essaient désespérément de s'intégrer, malgré un tatouage sur le front clamant en lettres d'or "" J'ai su tout de suite que c'était une extra-terrestre : il m'a suffi de la voir traverser le self en trottinant pour payer son repas de rentrée, de la démarche pataude caractéristique du petit veau abandonnite qui ne trompe personne. J'ai alors ravalé le cri d'effroi que je sentais poindre dans mon larynx, en pensant très fort Memento Droopy**!
En peu de temps, Cinderella s'est bâti une légende. Tout le monde a peur de se retrouver seul avec elle, ne serait-ce que parce qu'elle essaie de faire connaissance avec vous trois fois par jour - il lui suffit d'une demi-heure pour oublier qui vous êtes (elle a fini par reconnaître une collègue à qui elle avait demandé cinq fois son identité dans la journée à la couleur de ses boucles d'oreille). J'ai vu dansune très sérieuse encyclopédie médicale Docteur House que l'hémisphère droit du cerveau était le siège de la reconnaissance des visages : je pense que le sien est abîmé - je n'ose pas me prononcer sur le cas de l'hémisphère gauche.
Remarquez que sa présence a beau nous plonger dans le plus grand désarroi, personne n'a encore jamais été désagréable avec elle. La compassion est ce qui fait de nous des hommes. Malheureusement, aucune de nos stratégies de survie n'a été convaincante. Si un jour vous vous retrouvez face à elle, inutile d'essayer :
En peu de temps, Cinderella s'est bâti une légende. Tout le monde a peur de se retrouver seul avec elle, ne serait-ce que parce qu'elle essaie de faire connaissance avec vous trois fois par jour - il lui suffit d'une demi-heure pour oublier qui vous êtes (elle a fini par reconnaître une collègue à qui elle avait demandé cinq fois son identité dans la journée à la couleur de ses boucles d'oreille). J'ai vu dans
Remarquez que sa présence a beau nous plonger dans le plus grand désarroi, personne n'a encore jamais été désagréable avec elle. La compassion est ce qui fait de nous des hommes. Malheureusement, aucune de nos stratégies de survie n'a été convaincante. Si un jour vous vous retrouvez face à elle, inutile d'essayer :
- L'écoute : sauf à vouloir tout savoir de sa vie (ou de son absence de vie), qui consiste à fuir son appartement parce que son voisin écoute la télévision très fort jusqu'à cinq heures du matin. Du coup, elle oublie de se réveiller et rate ses heures de cours.
- La diversion : même si vous êtes deux à discuter très sérieusement de
l'effroyable nouvelle paire de babouches de la chefla mise en place de l'aide aux devoirs, Cinderella vous interrompra. À deux collègues qui parlaient de marmottes (ne me demandez pas pourquoi, c'est un récit de seconde main : je ne peux pas participer à toutes les conversations importantes), elle a avoué que son surnom était "Lapin" et qu'elle avait un range-pyjama Bugs Bunny. OMG!
- La pédagogie : chaque année, les journalistes en herbe d'Haquenée choisissent les profs dont ils veulent faire le portrait chinois. Ils optent en général pour ceux qui viennent d'arriver, surtout pour ceux qui ont un grain (exemple compromettant ici). Evidemment, Cinderella est leur va-tout pour le premier numéro de l'année. Mais encore faut-il aller lui proposer. La malheureuse élève volontaire a essayé de lui expliquer ce en quoi consiste un portrait chinois pendant pas moins d'un quart d'heure, avec moults exemples. À la fin, Cinderella a conclu : "En fait, il faut juste répondre aux questions comme si on était un Chinois". Elle a voulu poser avec les enfants pour la photo (puisqu'on vous dit qu'elle est gentille), mais aucun n'a voulu : il a fallu inventer une excuse diplomatique...
- L'humour : une collègue un peu boute-en-train, s'est retrouvée seule avec elle à la photocopieuse. Constatant qu'elle photocopiait des partitions, elle lui a fait remarquer avec un clin d'oeil qu'il n'y avait pas beaucoup d'images dans son bouquin. "C'est normal, c'est de la musique" s'est-elle vu opposé. Notre farceuse a pu s'offrir gratuitement le plaisir de passer pour la plus bête des créatures de la savane et découvrir que le rire est une affaire de Terriens. Pourtant, Cinderella réagit à des situations hautement comiques (démonstration ci-dessous).
- L'indifférence polie : je suis le témoin bien involontaire de l'anecdote suivante qui m'a plongé dans la quatrième
démissiondimension de la blague. En longeant le couloir en direction de la salle des prof, j'ai dû remonter un torrent d'élèves qui patientaient avant d'entrer en permanence. Ils étaient si nombreux que ça bouchonnait jusque devant la porte de notre sanctuaire. Lorsque je réussis enfin à me frayer un passage et à ouvrir la porte, je me retrouve en tête à tête avec Cinderella. Du couloir me parviennent, étouffés, les aboiements d'une surveillante qui tente d'obtenir un rang discipliné. Je devine aussi ce qui ressemble à une vague de protestations. L'affaire en serait restée là, n'étaient les oreilles bioniques de Cinderella. Pendant que je fais du tri dans mon casier de Minipouce, je la vois qui ricane toute seule. Puis, sans que je lui demande rien, elle me raconte trois fois de suite la même histoire :
" Ça me fait rire parce que la surveillante leur dit de se ranger et là, il y a un élève qui dit : oui, mais il y a une longue queue hihihihi".
Voilà le fin mot de l'histoire : Cinderella a un gros faible pour le comique cochon à queue en tire-bouchon. J'avoue que je ne sais pas trop quoi dire, alors je continue mon classement en souriant civilement, tandis qu'elle reprend : "Hihihi, la surveillante leur a dit de se ranger et là, il y en a un qui a dit : oui, mais il y a une longue queue. Tu comprends? Ce qui est drôle, c'est que, nous, on pense tout de suite au piano à queue, au piano trois-quart-de-queue, au piano demi-queue, au piano quart-de-queue. Il y a aussi le piano droit et le piano crapaud. Hihihihi. J'aime bien rire. Je suis toute guillerette aujourd'hui..."
Voilà le fin mot de l'histoire : Cinderella a un gros faible pour le comique cochon à queue en tire-bouchon. J'avoue que je ne sais pas trop quoi dire, alors je continue mon classement en souriant civilement, tandis qu'elle reprend : "Hihihi, la surveillante leur a dit de se ranger et là, il y en a un qui a dit : oui, mais il y a une longue queue. Tu comprends? Ce qui est drôle, c'est que, nous, on pense tout de suite au piano à queue, au piano trois-quart-de-queue, au piano demi-queue, au piano quart-de-queue. Il y a aussi le piano droit et le piano crapaud. Hihihihi. J'aime bien rire. Je suis toute guillerette aujourd'hui..."
Comme le dit si bien Follet***, qui a vivement regretté de n'être point là pour vivre ce quality moment avec moi : "C'est bien de pouvoir partager une histoire de queue à deux".
Pitou G.
* Ce n'est évidemment pas son vrai prénom. Le vrai est... plus surprenant.
** Souviens-toi de Droopy (mouais, c'est beaucoup mois drôle avec son pseudo!). Pour ceux qui débarquent d'ailleurs, un peu comme Cinderella en fait, Droopy était son prédécesseur à ce poste réputé maudit.
*** Follet est un pseudonyme astucieusement trouvé pour mon nouvel acolyte de bitchage.
8 commentaires:
J'adore !
N'importe quel adulte normalement constitué pense tout de suite au piano, c'est une évidence.
Purée, c'est du gratiné !
Mais, il a le feu (où j'pense), Follet !?
Ben quoi? Moi aussi je pense au piano, hein!
Le piano, évidemment! et comme tout le monde...
Ca me laisse sans voix... Et je ne regrette pas cette attente : ça vaut les meilleurs teasing de séries !
mais non, tu as fait une faute d'orthographe, maître ! j'ai immédiatement pensé à Queux ..
J'adore ta cinderella. Mais surtout, tu ne nous l'envoie pas, hein?
Somme toute, le problème, c'est pas que son range-pyjamas soit un range-pyjamas Bugs Bunny. C'est qu'elle possède un range-pyjamas, punto.
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