Vivre dans une ville à
taille minipouce humaine a de multiples avantages.
Bien sûr, vous ne pouvez pas mettre le nez dehors sans tomber sur
quelqu'un que vous n'avez pas forcément envie de voir et je sais
bien que d'ici dix ans, je ne pourrai plus éviter les boutiques où
travaillent d'anciens élèves. Mais j'apprécie de me passer de
voiture au quotidien ; quant à ceux qui n'ont pas ce luxe parce
qu'ils vivent à St-Patelin-des-bois ou Bourg-le-Zouave, ils
s'épargnent les bouchons à répétition, à condition d'éviter les
abords de Jules-Edouard Leclerc sur le coup de 18 heures.
On pourrait croire que
bénéficier de telles conditions de vie inciterait à la détente.
En fait, ça rend les gens encore moins patients : tout obstacle
est vécu comme une souffrance insupportable. Pis, un affront :
ils sont le couillon de service pris dans un embouteillage en
quasi-cambrousse, le débile profond de la circulation routière. Or,
il y a quelques semaines, il a fallu pour une raison X ou Y que l'on
fermât un axe très passant à deux pas de chez nous. Pendant
quelques jours, notre rue, d'ordinaire déjà assez peu calme, a été
encombrée du matin au soir, transformant l'automobiliste lambda en
créature des marais dégoulinante de bave. Mon homme a béni
l'habitude qu'il a prise d'aller travailler en vélo, au moins
jusqu'au vendredi soir, jour où l'on a atteint l'acmé gobelinesque
car le flux habituel des clients de Leclerc se trouvait grossi des
nombreux prétendants au week-end ou de Bretons regagnant la
Bretonnie. Si notre quartier avait été un être vivant, il aurait
ce soir-là succombé à une occlusion intestinale de première
catégorie.
Mon homme se mouvait avec
légèreté au milieu d'une foule de véhicules à l'arrêt dont les
hôtes bouillaient intérieurement. Alors qu'il tournait à gauche
pour rentrer à la maison, il coupa honteusement la route à une
voiture déjà immobilisée. Trouvant enfin une cause visible à cet
inadmissible embouteillage (à condition d'avoir le cerveau d'un
hamster et de croire possible que la cause survienne après son
effet), attentat délibéré à son honneur de conducteur couillu, un
automobiliste que nous nommerons Hamtaro agonit Pitou V. d'insultes
et de coups de klaxon – en cela imité par une demi-douzaine
d'autres cochons d'Inde encagés. Klaxonner comme un beau diable
constitue dans de telles circonstances, cela va de soi, une nécessité
absolue : il faut avertir toute l'agglomération qu'un canard de
cycliste a la folle audace de tourner à gauche alors même que vous,
pauvre victime, vous êtes bloqués depuis six minutes dans un
scandale de bouchon.
Puisqu'on vous dit qu'Hamtaro peut être une vraie teigne! |
Pitou V ;
réenfourcha son vélo et passa devant notre porte sans oser rentrer
par crainte de représailles – parce que, l'auriez-vous cru ?
Une fois le cycliste parti, les voitures n'avancèrent pas davantage.
Oui, vraiment, je suis bien content de me passer de voiture au
quotidien...
Pitou G.
9 commentaires:
j'aurai aimé avoir l'audace d'un tel acte pendant nos années parisiennes!
Woaouh !!! tellement bien narré que j'ai carrément cru que j'y étais, à un balcon peut-être ( paske j'ai pas de vélo, qu'est-ce que tu crois ^^)
Quelle courage !
Et... très bonne année à vous, les Pitous !!
AAAArghhhh, désolée pour ce quelle qui aurait dû être un quel ci-dessus, ça piiique les yeux !!
:-S
Lol ! t'en fais pas pour la faute qui pique les yeux... j'aurais rectifié de moi même !
et oui : quel talent de narratrice !
narrateur ... ben voilà c'est mon tour de me louper... trop de blogs de fille dans mes favoris je crois ;)
J'aime bien vous erreurs et vos scrupules : ils multiplient par deux le nombre de commentaires!
Être confondu avec une fille, quelle insupportable avanie! ;-)
oui je comprends bien... j'en suis sincèrement désolée croyez moi !!!
Je savais en cliquant que j'avais écrit une connerie hein... mais en cliquant... pas avant ! comme beaucoup de gens je réfléchis parfois après... ça ne sert souvent plus à rien, je devrais tourner la molette de la souris 7 fois avant de cliquer... promis je ne le ferai plus !
J'aime bien "vous erreurs" ???
Mouhahahaaaaa ! C'est la malédiction du clavier, je crois.
Tiens, un comm de plus, c'est cadeau ! ^^
Je ne trouve pas V. bien prudent ... il est d'une candeur parfois ! Imaginer adoucir la bête en lui parlant avec calme et voix grave ...Mais enfin !!
Jecaracoledebarenbar
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