D'accord, je n'ai pas blogué depuis des mois et des mois.
D'accord, la Cour des Miracles* dont j'ai la charge cette année ne me laisse plus assez d'énergie pour écrire (ni de foi dans l'avenir, mais n'anticipons pas).
D'accord, je tiens une crève de tous les dieux et deviendrai un ancêtre dans un peu plus de quinze jours.
Il n'en reste pas moins qu'hier, c'était l'Eurovision et que je n'ai pas le droit de laisser filer l'événement sans réagir. C'est une question d'éthique. C'est une question d'équilibre charmique entre des forces qui nous dépassent.
Je ne vais pas m'apitoyer longtemps sur le sort d'Anggun. Je n'ai rien contre elle - ni contre l'idée de voir des athlètes torse nu faire les marioles sur scène. Mais, si j'ai eu la faiblesse d'espérer un demi-instant en découvrant le micro-reportage précédant le show, sans avoir jamais entendu sa chanson en entier, qu'elle avait une demi-chance d'arriver dans les cinq premiers, j'ai déchanté aussitôt après son passage. Ce n'était pas que c'était franchement nul, hein, mais ce n'était pas franchement bon. Il y avait un truc qui ne collait pas. On l'entendait à peine chanter; la musique retentissait trop fort, limite dissonante. C'était comme si on avait essayé de jouer l'épate avec pas grand chose, au fond - autant laisser Kamel Ouali s'occuper de la choré. Je suis sorti de là avec l'impression de n'avoir rien vu ni entendu. La faute au réalisateur? On n'a qu'à dire ça!
Je ne vais pas non plus m'attarder sur cette pulsion intérieure que j'ai appris à maîtriser depuis le temps que ça dure et qui me donnait autrefois l'envie de hurler : "Bande de c°ns! C'était bien la peine de vous fracasser la tête si c'est pour voter les uns pour les autres 20 ans plus tard!" J'en viens à penser que si la Yougoslavie a éclaté, c'est pour le plaisir de se présenter plus nombreux à l'Eurovision et augmenter ses chances de victoire en même temps que le nombre de ses électeurs! Une solution pour écourter la soirée? Recoller Serbie, Monténégro, Bosnie, Croatie et l'Ex-République Yougoslave de Macédoine qui, jusque dans son nom, porte le regret de son indépendance. On pourra avec profit remailler l'Union soviétique - inutile de faire l'inventaire de toutes ces républiques (avec ou sans guillemets) qui votent les unes pour les autres, vous les connaissez. Les Russes pourraient envoyer une chèvre, ils seraient sûrs de figurer dans le peloton de tête. Cette année, ils ont été encore moins fair-play que d'habitude : ils ont fait concourir une poignée de grands-mères sans le sou pour émouvoir le chaland et faire pleurer Margaux. Je suis fort surpris qu'avec une telle artillerie, ils n'aient pas remporté la première place! Pour conclure sur le vote diplomatique, il faut bien avouer que ça a beau être usant, ça n'empêche pas, chaque année, qu'un gagnant se détache nettement des autres en faisant quasiment l'unanimité.
Non, le truc qui m'a vraiment scié, cette année, c'est que j'ai eu, devant l'Eurovision, la même impression que devant les présidentielles (sauf que Nadine Morano ne porte pas de robe à plume, ni Manuel Valls de sweat à capuche - ce que je regrette amèrement, croyez-le bien) : une incompréhension totale. J'ai complètement perdu mon flair de l'air du temps, je vis sur une autre planète, dans mon élite d'esthètes à l'abri du monde réel. Dans le monde réel, il y a une grosse proportion de gens qui croient dur comme fer qu'"on n'est plus chez nous" et que le monde entier veut immigrer en France pour profiter de notre naïveté et de nos prestations sociales (réveillez-vous, les gens : il suffit de regarder l'Eurovision pour s'apercevoir que personne ne veut venir en France, même pas les Belges!) Dans le monde réel, ce sont les chansons les plus insignifiantes qui recueillent les suffrages. La nouveauté de l'édition 2012, c'est que sur les cinq premiers, on compte pas moins de trois bouses infinies que j'aurais juré voir dans les limbes du classement : l'horrible Björk vampirique de l'Albanie qui ressemble à un Picasso vivant, 5ème! La fadissime azerbaïdajanaise (une Azéri à zéro!) avec sa robe à plumes et sa bluette inconsistante, 4ème! 3ème, le Serbe, je suppose que c'est une blague : lui n'a même pas une belle robe pour expliquer son succès, ni même la belle gueule du Norvégien qui a fini bon dernier (c'est triste, ce monde qui n'est même plus victime des apparences!). Pour ces trois-là, je ne peux même pas dire qu'ils ont engrangé des points pour de mauvaises raisons : ça relève du mystère le plus pur, un peu comme si Nathalie Sorce avait gagné en 2000!
Maintenant, si je regarde les sept derniers, France comprise, il n'y a pas trop de surprises. Où sont donc passés mes chouchous? La bombasse chypriote, la Roumaine latino et les Moldaves qui nous ont encore offert une chanson à la Kusturica (il n'y a pas à dire, certains pays ont une forte identité sonore : Grèce, Turquie, Moldavie...) n'ont pas démérité ni fait de franche étincelle. Même sort pour les OVNIS : les jumeaux irlandais, à mi-chemin entre le magicien d'Oz et les chevaliers du Zodiaques ou l'Ukrainienne, Vincent Mac Doom en vahiné, n'ont pas vraiment impressionné.
Cette session ne fera donc pas date à mes yeux. C'est pourquoi la chanson que j'ai choisie pour clore cet article n'a jamais représenté aucun pays à l'Eurovision (et pourtant, grands dieux, qu'elle y aurait eu sa place!) C'est à mes yeux la quintessence de ce concours : une langue indiscernable (du serbe, je crois), une robe improbable (elle existe en rouge et en blanc : on en a de la chance), ce qu'il faut de décolleté et de rythme endiablé. mesdames et messieurs, acclamez Margo!
Pitou G.
(Enfin de retour?)
*Il faudra bien un jour que je vous en reparle : il y a matière!
9 commentaires:
J'étais sûre que l'Eurovision nous vaudrait votre retour, au moins momentané!
J'ai quelques interrogations. Aussi vous soumets-je celle qui me semble cruciale:
Y aurait-il une quelconque corrélation entre "J'ai complètement perdu mon flair de l'air du temps..." et "je ... deviendrai un ancêtre dans un peu plus de quinze jours."
Aaaaah.... Tout, et même l'Eurovision, était tellement mieux quand nous (vous) étions (étiez) jeune!
(AÎeuh! pas sur la têteuh!)
Ah ? L'Eurovision ? C'était hier soir ? J'ai complètement décroché depuis des années, depuis que les commentateurs couvrent de remarques débiles tout ce qui n'est pas chanson, depuis que trop de pays n'envoient que des tocards pour être sûrs de ne pas accueillir le concours l'année suivante, depuis que mes goûts musicaux, figés dans le formol très certainement, me font me dire que je ne suis plus à la page. C'est toujours pareil ?
Oh ! Vive l'Eurovision (que je n'ai jamais regardée mais qui nous vaut un post) !
C'est amusant, une semaine avant je me disais "dommage que les Pitous ne postent plus, d'habitude je connais les résultats de l'Eurovision (et ai par là-même confirmation que ça existe encore), grâce aux Pitous. Un peu défaitiste, mais ne perdant pas espoir, je suis quand même repassée ^^ Ravie de vous lire à nouveau (même si ce n'est qu'un court instant).
Tu n'as pas pu résister à l'appel de l'eurovision et c'est une bonne nouvelle !!!
Quel est ce point d'interrogation inquiétant qui conclut ton article?
Je vais vérifier ton blog toutes les semaines et ce matin est en tout souriant!
Bises à vous 2
Jebaguenaudedanslespaturages, mais plus pour longtemps
Si je reviens, vous revenez? (en plus que j'ai regardé l'Eurovision en pensant à vous)
Oh oui oh oui revenz tous !!on s'ennuie!
ben oui quoi !! Musiquette, Ashley, les Pitous, je suis retombée sur la photo du we chatal.. Il fut un temps où nous tenions notre blog à jour régulièrement.... Reviendez ! (et pas seulement pour l'eurovision, hein, parce que bon... mis à part quand j'écoutais le 45 tours de Marie Myriam, c'est pas un peu nunuche???)
Kupi me, ça veut dire "copie-moi"? Parce que je ne suis pas bien sûre de vouloir la copier!
Contente de vous relire.
Merci Bakou d'être encore là, toutes et tous, malgré nos longs silences!
Et oui, Mamy S, rien de tel que l'Eurovision pour prendre un nouveau départ bloguinal. Soit dit en passant, mon ancestralisation avance à grands pas!
Et oui, VAO, l'Eurovision c'est toujours un peu la même chose. Mais il y a de beaux garçons à regarder. Pour cette édition, la palme du beau gosse revient haut la main au grand perdant, un mannequin norvégien d'origine iranienne, "membre de la fédération européenne des chanteurs à capuche", pour paraphraser le commentateur mâle de ce cru qui ne s'en est pas trop mal sorti.
Et oui, Inci, il ne faudra pas hésiter à revenir de temps à autres!
Et oui, Belle des champs mais plus pour longtemps (un peu pénible cette anaphore, non? À toi le grand Sud de ta prime jeunesse et bonne quête d'une nouveau logis!
Et oui, Ashley, on ne te laisse pas le choix : REVIENS! On a besoin de ton émulation et de ton humour, par ici. Et au diable Hit@chi!
Musiquette, tu as bien raison : faisons donc pression sur Ashley!
Guilitti, c'est vrai qu'il remonte à des lustres, notre week-end châtal... Soupir!
Shenisha, je crois que ça veut dire "achète-moi", si c'est bien du serbe et si Gougoule traduction n'est pas trop naze (je doute de l'un comme de l'autre). Cela dit, je n'achète pas non plus!
À très bientôt!
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